A l’annonce aujourd’hui de la disparition, à 88 ans, d’un des derniers monstres du cinéma français, c’est la réplique culte qu’on retiendra, forcément, de Bébel, alias Michel Poiccard, jeune voyou insolent, filmé en 1960 dans « A bout de souffle ». Un des films-phares de la Nouvelle Vague, l’œuvre de Jean-Luc Godard lança celui qui devait aussi devenir célèbre pour ses cascades, qu’il mettait un point d’honneur à toujours réaliser lui-même. Retour sur quelques scènes clefs.
« Quand j’ai tourné « À bout de souffle », je pensais que je faisais quelque chose de très précis. Je réalisais un thriller, un film de gangsters. Quand je l’ai vu pour la première fois, j’ai compris que j’avais fait tout autre chose. Je croyais que je filmais le « Fils de Scarface » ou le « Retour de Scarface » et j’ai compris que j’avais plutôt tourné « Alice au pays des merveilles », plus ou moins. » expliquait Jean-Paul Belmondo en 1968, à l’occasion d’une table ronde sur le cinéma organisée à Los Angeles. Plutôt déconcertant pour un acteur qui découvre sur le tournage que « Godard écrivait ses dialogues sur une table de bistrot, soufflait leur texte aux comédiens pendant les prises, et arrêtait le tournage quand il n’avait plus d’idées », raconte Raymond Cauchetier, photographe de plateau. Le réalisateur ne dérogera pas à la règle dans « A bout de souffle », où il fait dire à son héros, le jeune voyou Michel Poiccard : « Si vous n’aimez pas la mer, si vous n’aimez pas la montagne, si vous n’aimez pas la ville, allez-vous faire foutre !»
Sorti en mars 1960, le film remporte pourtant un triomphe public et critique et impose l’acteur jusque-là plus porté sur le théâtre. Le cinéma lui donnera le cadre idéal pour s’exprimer. Très physique, cet élève indiscipliné découvre très jeune le plaisir du sport. D’abord avec le cyclisme puis le foot, mais c’est la boxe qu’il va longtemps pratiquer. En amateur, et brièvement en professionnel durant son adolescence avec quatre victoires et un match nul en neuf combats. De cette passion pour le ring il déclare : « À 15 ans, après avoir écouté à la radio la victoire de Marcel Cerdan sur Tony Zale, je n’avais qu’une idée : faire de la boxe. Mais, pour boxer, il faut avoir faim et avoir la haine. Ce n’était pas mon cas ». Il en gardera pourtant un goût prononcé pour l’action et se rendra célèbre notamment pour ses cascades.
« C’était un héros aussi bien devant que derrière la caméra », selon Claude Lelouch. « Il était dans la vie comme dans ses films », a réagi le réalisateur sur France info, c’est sans doute le souvenir que garderont les 160 millions de spectateurs que l’acteur au 80 films a su ternir en haleine pendant 50 ans.
L’homme de Rio
1964, quatre ans après le triomphe de « A bout de souffle », le film de Philippe de Broca met en scène Jean-Paul Belmondo, non doublé comme il en prendra l’habitude, pendu à un hélicoptère au-dessus de Venise. Une scène culte du cinéma français.
Cent mille dollars au soleil
La même année, toujours en 1964, c’est au milieu du désert, au volant d’un poids lourd qu’on le retrouve, aventurier dans « Cent mille dollars au soleil », sous la caméra de Henri Verneuil avec pour comparse, un autre amateur de boxe, Lino Ventura.
Peur sur la ville
Plus de dix ans après « L’homme de Rio » en 1975, on retrouve Belmondo suspendu à un hélicoptère au-dessus du vide dans « Peur sur la ville » d’Henri Verneuil. L’acteur est alors catalogué dans les films d’action, un genre qu’il trouve rapidement trop à l’étroit.
Le Guignolo
Dans « Le Guignolo », en 1980, Bébel réédite sa cascade en hélicoptère, sous la direction cette fois de Georges Lautner. Et c’est Michel Audiard qui lui glisse quelques répliques bien senties.