La photo de Nims Dai au sommet du K2 (8.611 m) ce week-end laissait entendre qu’il avait réussi le double exploit de gravir pour la première fois le deuxième sommet le plus haut du monde en hiver ET sans oxygène, mais le doute planait encore. Le voici levé, avec la publication de son dernier post sur Facebook.
Longtemps critiqué pour son enchaînement express « avec oxygène » des quatorze sommets de « 8000 » en sept mois réalisé en 2019, l’ancien Gurkha va définitivement faire taire les commentaires. Comme nous l’annoncions samedi, l’ex membre des forces spéciales britanniques, passé également par le non moins prestigieux corps des Gurkhas, vient de réaliser la première ascension hivernale du K2, l’un des derniers grands défis de l’alpinisme. Un exploit réalisé avec ses neuf autres compagnons népalais, présenté non pas comme un succès individuel, mais comme l’aboutissement d’un effort collectif. Ce qui n’est pas le moindre des exploits, quand on connait Nims Dai …
Restait à savoir si le Népalais avait atteint son objectif complet : réaliser son ascension sans assistance d’oxygène. Autrement dit dans les règles de l’art, seul exploit qui vaille aux yeux de la plupart des alpinistes. Si les observateurs n’en attendaient pas moins du compagnon de Nims Dai dans cette expédition, Mingma Gyalje Sherpa, coutumier du fait (point qui reste toutefois à confirmer), le doute planait sérieusement en ce qui concernait Nims Dai. Toujours aussi efficace, le Népalais leur aura répondu via Facebook par un long post assorti d’une photo dont nous retranscrivons ici le texte complet.
K2 winter was a beast of a challenge. I firmly believe that a feat of such caliber is never possible if you don’t have a…
Publiée par Nirmal Purja sur Lundi 18 janvier 2021
« L’hivernale du K2 a été un bête de défi. Je crois fermement qu’un exploit d’une telle ampleur n’est pas possible si vous n’avez pas d’objectif qui ait du sens ou s’il ne vise que votre propre gloire.
J’ai toujours su de quoi mon esprit et mon corps étaient capables. Pour être franc, lors de mes précédentes expéditions, j’avais eu recours à l’oxygène mais à partir de 8000m seulement. Jusqu’à cette altitude, j’étais personnellement satisfait de mon efficacité. C’était mon choix et j’avais mes propres raisons et ma propre éthique. Cette fois-ci, la décision de grimper avec ou sans oxygène supplémentaire (O2) a été difficile à prendre. En raison des conditions météorologiques et du temps imparti, je ne m’étais pas suffisamment acclimaté. Je n’ai pu dormir que jusqu’à la hauteur du camp 2 (6 600 m). Idéalement, les grimpeurs doivent dormir OU au moins toucher le camp 4 avant de se diriger vers une poussée au sommet. Le manque d’acclimatation, les engelures développées dès la première rotation et le ralentissement des autres membres de l’équipe, mettant en danger la sécurité de tous, étaient les principales incertitudes à prendre en compte.
La sécurité de mon équipe est et a toujours été ma priorité absolue. J’ai mené 20 expéditions réussies jusqu’à présent et tous les membres de mon équipe sont rentrés chez eux exactement comme ils l’avaient fait, c’est-à-dire sans perdre un doigt ou un orteil.
J’ai pris un risque calculé cette fois-ci et j’ai continué sans O2 supplémentaire. Ma confiance en moi, la connaissance de la force et des capacités de mon corps et mon expérience de l’ascension acquise lors de mes 14 x 8000 m’ont permis d’assurer le suivi du reste des membres de l’équipe tout en restant en tête.
MISSION ACCOMPLIE ! K2 HIVER SANS OXYGÈNE SUPPLÉMENTAIRE !
Il y a de nombreux cas où des grimpeurs ont revendiqué des sommets sans O2, mais ils avaient suivi la trace que nous avions faite et utilisé les cordes et les lignes que nous avions fixées. Certains de ces cas sont très connus au sein de la communauté des alpinistes. Là, je demande, qu’est-ce qui est classé comme une ascension « by fair means »(dans les règles de l’art, ndlr) ?
Personnellement, cela n’a jamais été une affaire importante pour moi et ça ne l’est toujours pas. Quand on vient, comme moi des forces spéciales britanniques, on est habitué à faire toutes sortes de choses, mais on n’en fait pas tout un plat. C’est une affaire de choix personnel. La nature et les montagnes sont pour tout le monde. A vous de faire votre propre choix ! »