Sur les réseaux, ce n’est pas encore la panique, mais l’inquiétude monte du côté des clients du Français Probikeshop, mais aussi de Chain Réaction ou encore de Bikester, frappés de plein fouet par la faillite de leur maison-mère, la société Signa Sport United. La fin du boom du vélo et le début d’une vaste braderie des stocks s’accumulant en magasin ?
« Je viens de voir que la maison-mère (SSA, ndlr) est en faillite et que par conséquent Probikeshop est aussi touché, je me demande vraiment ce qui va se passer » écrit un internaute le 3 novembre. « J’étais censé me faire rembourser 500e pour mon ancien vélo fixie inc qui a eu un rappel suite à cadre dangereux, et pris un vélo à 1200e à la place en paiement x4, vous pensez que les concernés se feront rembourser ? ou récupérer leur achat ? ». A ce stade, difficile de savoir quelle réponse ce malheureux client va recevoir, d’autant que les messages affichés sur les différents sites et l’absence de réponses des services client ne laissent rien augurer de bon. Mais ce qui est certain, c’est qu’il n’est pas le seul à être touché très directement par le dépôt de bilan du groupe allemand Signa Sport United comptant dans son giron le leader français de la vente en ligne de vélo mais aussi Bikester, Chain Réaction ou Wiggle par exemple.
Peu connu du grand public, Signa Sport United ( SSU) est spécialisé dans la vente de produits de running et vélo, or début octobre ce groupe a subi de grosses pertes au niveau de son chiffre d’affaires et tout particulièrement sur le vélo. Conséquences : retrait de la bourse new-yorkaise le 10 octobre, annulation d’un investissement de 150 millions d’euros et dépôt de bilan de son site britannique Wiggle. Et en France : les clients des sites appartenant au groupe qui demandent où en sont leurs commandes se voient répondre que « certaines commandes sont retardées ». Réponse qui ne rassura guère ceux qui ont appris que Internetstores – division du groupe Signa Sports United – venait de déposer son bilan entrainant dans sa chute Bikester ou Probikeshop, pour ne citer qu’eux.
L’euphorie post Covid douchée par l’inflation
Un cataclysme quand on sait que, via Internetstores, SSU est le leader mondial de la vente de vélo en ligne, ce qui pourrait marquer la fin du boom que l’industrie du vélo connait depuis quelques années. On se souvient qu’en 2020, Covid oblige, les Français – mais pas seulement eux, le phénomène étant quasi mondial – se sont rués sur le deux-roues, enclenchant une euphorie sans pareille… et une spirale infernale ! Augmentation de la production, boom des commandes des magasins et… sur-stock, quand soudain arrive un nouveau fléau, l’inflation, encore aggravé par la baisse de la demande, l’engouement des amateurs de cycle se calmant quand même progressivement. L’année dernière, le secteur représentait encore 3,6 milliards d’euros, mais il était largement capté par le vélo à assistance électrique (VAE) – dont le prix moyen est de 1 965 euros – avec 738 454 VAE vendus en France cette année là. Mais 2023 risque d’être bien différent. Car si le marché du VAE n’est pas encore morose, sur le vélo musculaire les magasins sont désormais plus occupés à essayer d’écouler leurs stocks – quitte à brader un peu les prix, qu’à passer de nouvelles commandes – ou à faire de la réparation, secteur en plein boom, lui. Shimano, s’en est d’ailleurs bien vite rendu compte car son chiffre d’affaires, véritable baromètre dans l’industrie du cycle, a baissé de 24,8 % sur les neuf premiers mois de l’année.
La fin d’une success story française
Dans la tourmente, c’est à la fin d’une belle aventure qu’on assiste aussi. Celle de Probikeshop, un habitué des croissances à deux chiffres, proposant quelque 50 000 références. Le 26 octobre 2020, le quotidien Le Progrès, racontait « Comment Probikeshop a passé le cap des 100 millions d’euros. « C’est à partir de son entrepôt logistique de 30 000 m² à Chaponnay (Rhône) que Probikeshop, le leader de la distribution en ligne de vélos et d’accessoires et pièces détachées de cycles, passe la surmultipliée. En quinze ans à peine Probikeshop, l’e-commercant spécialisé dans la vente de vélos et d’accessoires et pièces détachées de cycles, a gravi des sommets, qui en appellent sûrement d’autres. Le Groupe né à Saint-Etienne, qui emploie aujourd’hui 200 collaborateurs, vient tout simplement de clôturer son exercice 2020 à près de 108 millions de chiffre d’affaires (37 % à l’international notamment en Espagne et en Italie), soit une croissance de 30 % alimentée par le boom du marché du vélo et probablement par la pandémie de Covid-19 et ses effets. » Trois ans plus tard, le quotidien annonce que son redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Lyon est une question de jours, car si en 2021 la société affichait 153 millions d’euros de CA et 4.18 millions d’euros de bénéfice, en 2022, son chiffre d’affaires est tombé 143 millions en 2022, pour 3.25 millions de pertes.
Des opportunités à saisir… avec quelques précautions
D’autres distributeurs tels que Chain Reaction et Wiggle ne semblent pas, pour le moment, impactés par de telles difficultés, mais on les a vu avancer de 15 jours leur opération Black Friday et ne pas hésiter à casser les prix, anticipant peut-être l’afflux massif de stocks que pourrait dégager la chute finale des géants de la vente en ligne dont le sort n’est certes pas scellé, une reprise étant toujours possible, mais dont l’avenir reste pour le moins incertain, les spécialistes du secteur ne s’attendant pas à un retour à la normale avant un an au moins.
De quoi offrir de belles opportunités pour le client sans doute, mais en prenant quelques précautions, recommande le magazine spécialisé Matos Vélo « le plus sûr reste votre vélociste…. où vous payez seulement ce que vous avez entre les mains. Pour l’heure, évitez toute commande chez ces gros acteurs tels que Bikester, Probikeshop, Wiggle & Chain Reaction, le risque est à mon avis trop grand que votre commande n’arrive jamais. Et pour ceux qui habitent loin d’un vélociste – car oui, on peut aussi habiter à 50 km d’un magasin de vélo ! – restent, en France, Alltricks, Materiel Vélo ou encore l’historique et précurseur Serge Dutouron qui semblent pour le moment, épargnés par ces gros pépins. Alltricks est adossé à Decathlon et a donc, pour le moment, les reins solides et Matériel Vélo ou encore Dutouron, plus petits acteurs, semblent avoir une gestion relativement saine. Même si ces sites semblent avoir du mal à régler certaines factures de fournisseurs depuis plusieurs semaines, nul doute que l’arrêt des prises de commandes chez Probikeshop & co se répercutera chez eux. »
Photo d'en-tête : Gruppopiu / Probikeshop.fr- Thèmes :
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