Juillet 1990, Thierry Renault et Alain Ghersen, deux légendes de la Compagnie des Guides de Chamonix, libèrent « Digital Crack », un vrai défi, une ligne unique de 8a, située sur un monolithe de granit rouge de 50 m au milieu de l’Arête des Cosmiques, au cœur du massif du Mont-Blanc, à 3800 m. 30 ans plus tard, en juin 2021, deux jeunes grimpeurs, Alessandro Zeni et Enzo Oddo, deux pointures, reviennent sur leurs traces. D’une génération à l’autre, une même émotion face à cette expérience unique, racontée à quatre voix.
« Digital Crack », tout simplement une escalade unique dans un cadre unique, située sur l’énorme monolithe de granit orange au-dessus de la célèbre Arête des Cosmiques, dans la vallée de Chamonix. Donc pas n’importe quel 8a, comme l’expliquent les premiers ascensionnistes Thierry Renault et Alain Ghersen, interviewés 30 ans après leur exploit dans ce court documentaire.
Equipée par Christoph Dat en 1988, la fabuleuse dalle verticale à fleur de paroi est libérée deux ans plus tard par Thierry Renault et Alain Ghersen, alpinistes légendaires. A l’époque, les deux hommes sont dans la fleur de l’âge. « Mi-juillet 90 » raconte Ghersen, on a eu vent de cette ligne équipée par Christophe Dat, deux ans auparavant, sur le dernier obélisque monolithe de l’Arête des Cosmiques. On était alors dans une dynamique d’ouverture et de libération d’itinéraires. On est allé voir… et on l’a fait dans la journée, assez vite. On était très bien acclimatés car on avait fait ensemble (avec Thierry Renault, ndlr), une semaine avant, la Divine Providence au Pilier d’Angle. A l’époque, l’idée était de reprendre des itinéraires qui avaient déjà été gravis, généralement en artif et puis essayer de les libérer. En 90, le libre « sportif », commençait un peu à naître, et cette année-là, où on préparait un enchaînement – les Drus, les Jorasses et l’Intégrale de Peuterey dans la foulée – aura été l’un des étés où j’ai le plus grimpé », se souvient-il.
« Digital crack », c’était un peu la cerise sur le gâteau », explique Thierry Renault. Et le gâteau c’était Divine Providence (…) C’était hyper attirant ce cailloux ! Et voir Enzo et Alessandro la répéter alors qu’ils n’étaient pas nés quand on a réalisé la première, c’est plutôt sympa. Ca veut dire que cette voie intéresse toujours ».
« S’y intéresser », c’est peu dire quand on écoute Alessandro Zeni et Enzo Oddo, deux pointures de l’escalade qui en juin dernier n’ont pas hésité à se frotter, eux aussi à cette ligne mythique.
« Digital Crack, c’est quelque chose de spectaculaire, d’unique », confie Alessandro Zeni. « Tu te trouves à grimper au centre de ce pilier, au milieu de l’Arête des Cosmiques. Tu es seul avec toi-même, c’est un sensation unique. Tu te sens immergé dans le Mont Blanc. C’est une expérience qui va au-delà de la simple escalade. »
Cette voie qu’il décrit comme » très technique, très précise, où les mouvements ne sont pas immédiatement intuitifs », selon lui, a également laissé sa trace chez Enzo Oddo, son compagnon de cordée ce jour-là. « Des voies comme ça, y’en a plein dans les falaises en granit, mais sa singularité, c’est qu’elle est en montagne. Et cet endroit, on n’y est pas souvent. En 90, il fallait y aller, il fallait avoir l’idée surtout ! » Aujourd’hui, si tous deux ont fait tant de kilomètres, c’est moins pour la difficulté, explique Enzo, que pour l’expérience : « se retrouver au sommet d’un monolithe, au milieu d’une nature sauvage, immense, grande … ». « C’est bien de se considérer comme des rêveurs, 30 ans après la première libre de cette voie, » résume, encore ébloui, Alessandro Zeni.
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