Le confinement a du bon parfois. Faute de courses, toutes annulées suite à la pandémie, la championne de trail suédoise – accessoirement compagne de Kilian Jornet – a pris le temps d’ouvrir les portes de sa ferme nichée à Romsdalen, à l’ouest de la Norvège. Entre entrainements, potager et cuisine, Emelie Forsberg se livre à la caméra de Salomon, son sponsor. A voir ce petit film, on aurait bien aimé être confinés dans son fjord nous aussi !
Depuis ses 18 ans, la Suédoise Emelie Forsberg vit plus ou moins en Norvège. Tour à tour à Jutenheim, à Tromsö, à Lyngen et maintenant à Romsdalen. Une vallée située à l’ouest du pays, ou les étés sont plutôt « sympas et chauds, et les hivers incroyables », dit-elle et surtout … « il y a toutes les montagnes dont on peut rêver ». Vital quand on sait combien son compagnon, Kilian Jornet, a la bougeotte.
A son arrivée dans le pays, elle rêvait d’acheter une ferme, raconte-t-elle. C’est chose faite aujourd’hui. Quatre moutons, un chien, Maui, et des kilos de fruits et légumes à planter et récolter, la championne de trail a de quoi s’occuper. Son rêve ? L’autosuffisance. Elle en est loin, avoue-t-elle, et en femme pragmatique, gère aussi en parallèle « Moon Valley », son business de barres de céréales.
Ajoutez encore que pendant son confinement rural elle s’occupe, avec le sourire toujours, de sa petite Maj, 1 an, et il y a de quoi démoraliser tous les confinés qui peinent aujourd’hui à s’extraire de leur deux-pièces cuisine après deux mois d’hibernation plus ou moins passive.
Reste que cette fille-là respire la joie de vivre, comme nous l’avions déjà constaté lorsqu’elle avait reçu notre journaliste, Pierre Le Clainche, dans son chalet de Chamonix, en août dernier.
En complément de ce reportage de 8 mn dans le quotidien de l’athlète, suivi de 50 mn de questions/réponses en anglais ( non sous-titrées), on pourra lire ou relire quelques extraits choisis de la longue interview qu’Emelie Forsberg nous avait alors accordée. Passion pour le jardinage, engagement en faveur de l’environnement … elle y disait déjà tout.
Extraits choisis de : Emelie Forsberg : « Kilian et moi partageons les mêmes valeurs »
Article de Pierre Leclainche paru le 29 août 2019
Ton rapport à la nature et à la nutrition est très important, d’où vient cette passion ?
Passion est un peu trop fort. Je dirai que j’ai toujours intégré la nutrition et la nature dans mon mode de vie. C’est à dire que j’ai toujours été sensible à mon environnement, manger des fruits et légumes du jardin est normal à mes yeux. J’ai toujours adoré cuisiner et confectionner des plats, faire attention à ce que je mange est normal pour moi, je n’ai pas eu à me forcer, j’adore jardiner et manger des légumes de saison.
A quel âge es-tu devenue végétarienne et pourquoi ?
A partir de 14 ans j’ai commencé à être végétarienne, à l’école en Suède on propose toujours un plat pour les végétariens. Ce choix fut assumé d’abord pour des raisons environnementales, car j’ai réalisé que la consommation de viande n’était pas si bonne que ça pour la planète comme pour notre corps. Et puis, une pensée m’a mobilisée : « qui suis-je pour manger d’autres animaux ? ». Je n’avais pas envie de me placer au dessus d’une catégorie d’espèces.
Tes parents ont-ils accepté ton choix ?
Oui mais par contre j’ai dû cuisiner mes propres plats à la maison car eux ne m’ont pas suivie dans mon choix (rires).
Que penses-tu du modèle d’éducation des enfants dans les pays mondialisés ?
(Soupir) C’est difficile à dire parce que tant de choses ont évolué ces quinze dernières années… Les écrans ont envahi notre quotidien et la sédentarité est devenu un problème que nous n’avions pas dans les années 90. Je pense néanmoins que leur utilisation est une bonne chose si elle est encadrée à l’école. En suède, tous les écoliers apprennent leurs leçons sur tablette. Il suffit juste, en tant que parents, d’en limiter leur utilisation et de forcer l’éveil de nos enfants au monde extérieur. (Maj se lève de sa sieste et assiste à la fin de l’interview, ndlr).
Maj nous a rejoint, vous allez faire quelque chose de particulier pour l’éduquer au monde extérieur ?
Je crois que l’éducation vient de la personne que vous êtes en tant que parent. Kilian et moi partageons des valeurs très fortes de communion avec la nature, donc c’est évident qu’on la sensibilisera à la faune et à la flore qui nous entourent. Je ne sais pas si je suis une bonne personne mais je sais comment j’aimerais que Maj soit plus tard, c’est à dire une bonne personne. On la laissera faire les choix qu’elle voudra pour vivre la vie qu’elle souhaite.
Au niveau scolaire, prônez-vous une certaine manière d’éduquer ? Allez-vous la placer dans une école Montessori ou lui faire des cours à domicile par exemple ?
Non ! Pas du tout ! On vit dans un petit village en Norvège où ce genre d’école n’existe pas, et de toute façon on souhaite qu’elle ait une éducation tout à fait normale et conventionnelle.
Comment vois-tu le futur de notre planète ?
(Petit soupir) Je suis de nature optimiste donc j’espère qu’on arrivera à redresser la barre en matière de protection de l’environnement mais je pense que les plus importantes décisions devraient être prises tout en haut de l’échelle sociale, au niveau gouvernemental. Bien sûr à notre échelle nous pouvons et faisons de petits gestes quotidiens pour la planète, mais la partie la plus importante de la pollution vient des grandes industries et des décisions politiques.
Dans le futur, souhaites-tu accroitre ton engagement public?
Bien sûr ! C’est quelque chose qui me trotte dans la tête et si je peux me servir de mon image pour sensibiliser et influencer des personnes dans le bon sens, je le ferai sans hésiter ! J’aimerais influencer les gens à manger local, à réfléchir à leurs investissements avant d’acheter une voiture thermique plutôt qu’électrique ou hybride par exemple.
Comment comptes-tu entreprendre ce travail de sensibilisation?
Pour le moment je poursuis ma communication avec les réseaux sociaux personnels comme Instagram et Twitter. De part mon engagement que j’ai avec Mimmi Kokta et Ida Nilsson et le lancement de notre marque « Moon Valley » (nutrition et hydratation sportive bio, naturelle et organique) on contribue à véhiculer une image « verte » et écologique de notre mode de vie même si celui-ci ne peut pas être irréprochable compte-tenu de notre vie d’athlète de haut niveau. On va sortir un livre fin octobre sur le mode de vie suédois, sur notre approche de la cuisine et sur la philosophie qu’adoptaient autrefois les fermiers de notre pays. On a hâte ! Je crois que le livre est très réussi, on y a mis beaucoup de coeur en tout cas (rires). J’envisage dans une second temps de créer une fondation pour défendre une bonne cause environnementale.
Et toi, qui t’a inspirée dans ta vie ?
Au niveau écologique, une auteure suédoise m’a beaucoup inspirée grâce à ses livres expliquant le pouvoir des plantes, Lisen Sundgren. Son livre, « Vildvuxet » est une petite pépite ! Durant mon enfance et par rapport au sport, je dirai que Magdalena Forsberg, une biathlète suédoise et Anja Pärson, une skieuse suédoise m’ont beaucoup influencée dans mon choix de devenir une athlète professionnelle.