La 12e édition de l’Opération Montagne Responsable aura lieu samedi à Chamonix. L’occasion de faire le point sur les déchets et l’évolution des comportements. Si au niveau individuel, il y a du mieux, trop d’entreprises « oublient » de laisser place nette en fin de chantier.
C’est un peu la mémoire de la Mer de Glace. Depuis plus de 20 ans, Philippe Dilloard, 72 ans, s’y rend au moins 4 fois l’an, de juin à septembre, pour y ramasser des déchets vieux parfois de plus de 50 ans. De sa voix chevrotante l’ancien boucher d’Argentière, originaire de Picardie, prend un évident plaisir à dérouler le fil du passé : de la construction du téléphérique Helbronner dans les années 40 à celle de l’Aiguille du Midi en 1957 en passant par l’arrachement du câble tracteur d’Helbronner par un avion de chasse en 1961… Ces événements ne sont pas choisis par hasard. Tous ont laissé leur trace sur la montagne : des centaines de mètres de câbles, des pièces industrielles, lesquelles se trouvent parfois encore là-haut, comme cette dameuse engloutie par une crevasse en 1990 lors de l’évacuation d’un câble. « Elle n’est toujours pas ressortie. Le jour où le glacier la recrachera, j’appelle TF1 » rigole-t-il.
Au Montenvers, on balançait tout
« Dans les années 60, on a commencé à ramasser les déchets le long de l’Arve. Puis, petit à petit on a remonté la pente » explique Philippe Dilloard. C’est le procès d’une époque insouciante, qui n’avait pas pris en compte la problématique environnementale. « Au Montenvers, on balançait tout, verre compris, dans les crevasses. Avec la fonte du glacier, c’est remonté à la surface. Verre pilé, skis cassés, câbles, boîtes de conserves, sodas, plastiques… Voici ce que l’on trouvait en abondance lors des premiers ramassages. »
Aujourd’hui, ces déchets ménagers ont presque disparu. « Les refuges et les restaurants répondent à des normes strictes, les guides répètent à leurs clients de ne « rien laisser. » On invite les gens à monter avec le minimum et à tout redescendre. » C’est une éducation à la montagne qui commence à porter ses fruits. « C’est un cercle vertueux. Si un lieu est propre, on a moins tendance à le souiller » conclut Philippe.
Une tonne de déchets va être évacuée
Samedi 7 septembre, à l’occasion de l’Opération Montagne Responsable, organisée par six organismes partenaires, publics et privés, un « big bag » de près d’une tonne de déchets sera évacué par hélicoptère de la Mer de Glace, à environ 2200 mètres. « Cela représente une soixantaine d’heures d’arpentage sur un carré de deux kilomètres, soit 40 hectares » rappelle Philippe, souvent aidé dans son labeur par des membres du Club alpin de Chamonix.
« Un village d’initiatives positives », en accès libre avec des ateliers participatifs et écoresponsables, sera le coeur de cette 12eédition, Place des Alpes, à Chamonix.
Guillaume Dupouy, accompagnateur en moyenne montagne et responsable des campagnes de ramassage de l’association Mountain Riders, un des co-organisateurs de l’événement, encadrera une des éco-randonnées qui jalonnera la journée. Des ramassages, il en a connu : « Mountain Riders en organise une soixantaine sur tout l’Arc alpin. 39 tonnes de déchets ont été collectés en 2018. L’OMR c’est pour nous le point d’orgue d’une saison d’actions. » En fin connaisseur des terrains de montagne, Guillaume se veut positif et ses analyses rejoignent les constats de Philippe Dilloard : « Il y eu une prise de conscience. La quantité de déchets ramassés diminue alors que les volontaires pour les ramassages sont toujours plus nombreux, c’est bon signe. » Les organisateurs s’orientent d’ailleurs maintenant vers des opérations de sensibilisation pour que les randonneurs apprennent à connaître l’environnement dans lequel ils évoluent. « On respecte ce que l’on aime et ce que l’on connaît » souligne Guillaume.
Il reste néanmoins des progrès à réaliser : les zones de fortes concentration touristique continuent de générer des déchets. On remarque aussi que les entreprises laissent énormément de déchets après des chantiers. « Après avoir éduqué les particuliers, il s’agira d’éduquer les entreprises » conclut Guillaume.
Pour en savoir plus sur l’opération Montagne responsable, c’est ici.
Photo d'en-tête : Philippe Dilloard- Thèmes :
- Alpes
- Environnement