Plutôt peu présents jusqu’à présent dans le débat environnemental, les skieurs pro semblent avoir pris l’intention de secouer la FIS. Hier, dimanche 12 février, quelques heures après la descente hommes des Championnats du monde de ski alpin, ils ont remis à la fédération une lettre ouverte préparée par Protect Our Winters (POW) afin d’exiger de leur fédération des mesures concrètes. Parmi les 170 signataires de différentes disciplines (ski alpin, freestyle, freeride), Aleksander Aamodt Kilde, Federica Brignone et… Mikaela Shiffrin dont la récente intention de circuler en hélicoptère pendant la coupe du monde avait soulevé un tollé auprès des associations environnementales !
« Notre sport est danger », alerte la lettre ouverte que la FIS s’est vu remettre hier, dimanche 12 février, quelques heures après la descente hommes des Championnats du monde de ski alpin, remportée par le Suisse Marco Odermatt. « De plus en plus de compétitions sont annulées faute de neige (…) bientôt il ne sera plus possible de produire de la neige artificielle sur plusieurs sites habituels de Coupe du monde vu l’augmentation des températures », s’inquiètent les 170 skieurs signataire du document.
Que demandent-ils à leur Fédération ?
1 Un aménagement du calendrier des compétitions, afin de réduire les déplacements intercontinentaux. Cette saison, le circuit alpin fait ainsi étape à deux occasions différentes en Amérique du nord.
2 Un décalage du début des compétitions. Compte tenu du manque de neige, plusieurs courses prévues fin octobre et en novembre 2022 ont été annulées. Il est donc urgent de décaler le début de la saison.
3 Une réduction de moitié de l’empreinte carbone par la FIS. Rien moins en fait que le respect par la fédération de son engagement annoncé en 2021. Et pour éviter qu’une fois de plus ces belles paroles résonnent dans le vide, les athlètes exigent qu’un plan concret soit « rendu public avant le début de la saison prochaine », et réclament une « totale transparence ».
« Il est grand temps d’aborder ce sujet très important. On voit que le monde change, on voit également l’impact que cela a sur notre sport », a expliqué Aamodt Kilde, dans la foulée de sa médaille d’argent obtenue lors de la descente. « Je veux continuer à faire ce que j’aime, nous devons faire de notre mieux pour que ça continue, mais je veux aussi que les générations futures puissent le faire », a-t-il affirmé. « C’est une super lettre qui aborde quelque chose que nous devons garder en tête toute notre vie. », a-t-il ajouté.
Le ton est ferme et on en peut que s’en réjouir. Cette lettre tombe à pic à l’heure où l’organisation du 6 au 19 février des 47e Championnats du monde de ski alpin soulève des remous à Courchevel. Par ailleurs, plus largement, on commençait en effet à se demander depuis quelques temps déjà comment se positionnaient sur les questions environnementales les skieurs pro, acteurs majeurs d’une pratique et d’un circuit dont l’impact est loin d’être neutre.
Voilà qui n’arrange certainement pas la FIS dont l’annonce fin 2021 de vouloir devenir la première fédération internationale « carbone-positive » grâce à un programme de protection des forêts vierges en Amazonie, n’avait pas convaincu (et le mot est faible !). D’ailleurs POW ne s’y était pas trompé, rappelant au passage à la fédération que ce projet devrait rester annexe, la priorité restant de « réduire les émissions » actuelles.
Un rappel qui n’est pas inutile car la Fédération n’avait pas brillé non plus par son indignation à l’annonce de l’attribution des Jeux asiatiques d’hiver à l’Arabie Saoudite. Un scandale écologique qui avait suscité d’énormes réactions dans le monde. Sommée d’enfin agir, la FIS va devoir cette fois passer à l’action très concrètement et ne plus se contenter de déclarations.
De quoi donner également à réfléchir à la star mondiale Mikaela Shiffrin, skieuse la plus titrée de tous les temps. Si aujourd’hui elle fait les gros titres de la presse pour son engagement environnemental – elle est signataire de la lettre ouverte et son aura auprès du grand public est bien sûr énorme – personne n’a oublié qu’il y a quelques jours, c’est sous la pression d’associations environnementales seulement qu’elle a renoncé à faire en hélicoptère le trajet entre la station de ski d’Orcières-Merlette (Hautes-Alpes), où elle s’entrainait et son hôtel de Gap ! C’est donc par la route qu’elle a dû se résoudre à parcourir les 40 km la séparant des pistes.
Photo d'en-tête : Erich Spiess- Thèmes :
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