Mieux que des mots, des chiffres : 56 kilomètres, 23 sommets, 14 voies d’escalade, 7300 mètres de dénivelé. Le tout en 32 heures ! Une sortie à la journée comme les aime Alex Honnold. Du sur-mesure, concocté par lui-même en octobre dernier, « dans son jardin », le Nevada, réussi grâce à quelques astuces inspirées de l’ultra running, dit-il. De quoi nourrir un doc passionnant enfin en libre accès (et deux parties) après avoir cartonné ce printemps dans le circuit Reel Rock.
Non content d’être le plus grand soliste libre de son temps, Alex Honnold est également un virtuose des méga tournées d’escalade. A son actif déjà : le légendaire «Sufferfest», 45 tours rocheuses dans le désert californien et 700 milles à vélo. Un périple bouclé il y a à peine dix ans avec Cèdre Wright. En 2020, c’est avec son pote Tommy Caldwell qu’il a réalisé en 36 heures le CDUL (Continental Divide Ultimate Linkup). Soit 11 itinéraires classiques, un total de 65 longueurs de corde, 6000 mètres de dénivelé et 56 kilomètres entre les deux.
Dans la foulée Alex a commencé à gamberger sur une traversée similaire, mais peut-être plus logique, de la ligne d’horizon du Red Rock Canyon, tout près de chez lui, dans le Nevada. Dès le départ, son objectif était d’atteindre tous les principaux sommets de grès de Red Rock par des itinéraires classiques, de les gravir et de les redescendre en solo, en une seule poussée soutenue. Pour concrétiser cette aventure il lui aura fallu attendre un an et demi, le temps d’avoir son premier enfant, de perdre un peu (beaucoup) de sommeil et de boucler un autre projet d’une toute autre nature, une expédition de six semaines au Groenland.
Pour l’aider dans ce projet qu’il a baptisé «HURT » (Honnold Ultimate Red Rock Traverse, l’acronyme en anglais de douleur !) , Chris Gorney, légende locale de l’ultrarunning et détenteur de nombreux FKT dans la région de Red Rock. Son expérience aura été précieuse. Il a partagé les traces GPS des segments délicats, rejoint Alex pour repérer une odyssée de plus de cinq heures sur le gigantesque Bridge Mountain et, s’est imposé comme un vrai soutien tout au long de cette journée insensée dont les chiffres sont vertigineux. 32 heures de course, d’escalade et de solo non-stop, 23 sommets, 14 voies, 56 kilomètres de terrain désertique accidenté et 7300 mètres de D+.
Comment s’est-il organisé ?
« J’ai attendu le 10 octobre, comptant sur la pleine lune pour m’aider à trouver ma route. », explique le grimpeur dans un long récit publié dans l’American Alpine Club. « Ma stratégie consistait à maintenir un rythme agréable et régulier aussi longtemps qu’il le faudrait, afin d’éviter que mon rythme cardiaque ne devienne trop élevé et que la fatigue musculaire ne s’installe. Je comptais également sur le soutien de mes amis et de ma famille pour me nourrir et m’hydrater afin de porter le moins possible. Pour les segments plus longs, lorsque j’aurais besoin d’un sac pour transporter suffisamment d’eau, j’avais prévu d’utiliser un gilet de course ; et, lorsque j’en aurais moins besoin, un sac banane. J’avais également prévu de grimper plusieurs voies sans sac de magnésie, pour éviter de devoir le transporter sur de longues distances entre les voies ; de grimper autant de voies que possible avec mes chaussures d’approche, pour ménager mes pieds ; et d’utiliser des guêtres de course pour couvrir mes chaussures d’approche – il y avait beaucoup de terrain hors sentier, et les guêtres devaient empêcher mes chaussures de se remplir de sable et de gravier. D’une manière générale, j’avais prévu d’utiliser un grand nombre d’astuces de l’ultra-running. » explique-t-il.
Comment a-t-il tenu le choc ?
« Parce qu’il est important de se fixer un objectif et de faire ce que l’on a dit, et pas seulement d’abandonner quand c’est difficile ».
Comment s’est déroulé le tournage ?
Après de nombreuses discussions et quelques réticences à compromettre la pureté d’un projet très personnel, Alex Honnold a accepté que l’accompagne une équipe de tournage légère équipée d’iPhones, complétée par le réalisateur Pete Mortimer, de Sender Films. C’est à lui au final qu’on doit ce documentaire.
Que pense Honnold de son projet au final ?
C’est bien mais… « La HURT – Honnold’s Ultimate Red Rock Traverse – s’est avérée un peu plus petite que ce j’avais rêvé, mais cela m’a semblé être un compromis raisonnable en faveur de la sécurité. Et il est certain qu’elle offre la quintessence de l’expérience Red Rock en une seule sortie », conclut-il quand même !
Partie 1
Partie 2
Les 14 voies du projet HURT
1. Tunnel Vision (6 longueur, 5,7)
2. Arête NE, Montagne Bridge (5 longueurs, 5.6)
3. Dark Shadows (10 longueurs, 5.8)
4. Cat in the Hat (7 longueurs, 5.6)
5. Community Pillar (6 longueurs, 5.8+)
6. Olive Oyl (5 longueurs, 5.7)
7. Aquarium (8 longueurs, 5.9)
8. Armatron (5 longueurs, 5.9)
9. Myster Z (5 longueurs, 5.7)
10. Crimson Chrysalis (11 longueurs, 5.8+)
11. Bird Hunter Buttress (12 longueurs, 5.9
12. Solar Slab (9 longueurs, 5.6)
13. Inti Watana (21 longueurs, 5.10c)
14. Epinephrine (16 longueurs, 5.9)LIST OF SUMMITS
Tous les sommets gravis
White Rock Peak
Goodman Peak
Duderino*
Buffalo Wall*
Sandstone North
North Peak
Bridge
Bridge Point
Mescalito
Magic Mountain
Rose Tower
Jackrabbit Buttress*
Juniper Peak
Cloud Tower*
Bench below the Rainbow Wall*
Rainbow Wall
Rainbow East
Mt. Wilson
South Summit Mt Wilson
White Pinnacle
Indecision Peak
Hidden Peak
Black Velvet Peak
*sommet non officiel
Photo d'en-tête : Reel Rock- Thèmes :
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