Si vous avez manqué l’avant-première sur Outside, il y a quelques semaines, de « Up and down » voici l’occasion de revoir le passionnant documentaire de Dylan Moron, désormais en accès libre. Ce film de 20 minutes nous conduit sur le Te Araroa Trail, un parcours qui, en dix ans, s’est imposé comme l’un des plus beaux treks du monde. 3000 kilomètres de sentiers traversent les deux îles de la Nouvelle-Zélande, alternant des portions en pleine forêt tropicale et des crêtes surplombant de magnifiques lacs turquoise. En octobre 2018, le jeune Français improvisait sa traversée, quelques jours après avoir atterri dans le pays. Une aventure superbement capturée dont on appréciera le regard humble et très altruiste.
Le Te Araroa Trail a tous les arguments pour séduire les passionnés de trekking. Inauguré en 2011, il reste encore peu connu du grand public – apparemment encore moins des Néo-Zélandais eux-mêmes – et parcourt tous les paysages du monde, concentrés sur deux îles. Le tout, sur 3000 kilomètres. Plages, forêts, jungles, volcans, montagnes et fjords : voilà ce qui rend unique le « T-A ».
En 2018, Dylan Moron s’envole pour la Nouvelle-Zélande avec un visa « vacances-travail » (PVT). Lors de ses préparatifs, loin de lui l’idée de se lancer sur le Te Araroa. C’est en arrivant sur place que le français, âgé de 22 ans à ce moment-là, découvre ce sentier de 3000 kilomètres qui relie les extrémités nord et sud des deux îles. « En arrivant, je n’avais pas vraiment de plan, l’idée était de travailler un peu et d’acheter un van pour faire un road trip et de la randonnée. Mais rien ne s’est passé comme prévu », explique-t-il.
« Quelques jours après mon arrivée en Nouvelle-Zélande, mon meilleur ami m’a parlé d’une randonnée longue de 3000 kilomètres : le Te Araroa Trail. À ce moment précis, j’ai su pourquoi j’avais fait tout ce chemin jusqu’ici : pour traverser le pays à pied », raconte le jeune photographe originaire d’Angers. « Je ne m’étais pas spécialement préparé physiquement. À l’époque, j’étais encore fumeur, alors autant dire que le cardio, ce n’était pas vraiment mon point fort. Mais j’étais déjà passionné de randonnée, j’en ai longtemps fait dans les Pyrénées. Et surtout, je voulais me reconnecter à la nature. »
Accessible même aux débutants
Finalement, ce sont les premières semaines de marche qui ont forgé Dylan – comme tous les autres randonneurs du Te Araroa. « Même si l’on est quelqu’un de sportif, personne n’est spécialement habitué à marcher un demi-marathon par jour – et pendant minimum trois mois si l’on veut le faire en entier. C’est pour ça que le début du trail est éprouvant. Mais tout compte fait, c’est une étape qui remet tout le monde au même niveau. Une fois que le corps s’est adapté, il n’y a plus de difficultés particulières. C’est un sentier accessible, même aux débutants, il y a très peu de passages engagés sur le sentier », décrit-il.
Accessible, oui, « mais à condition d’avoir un mental assez fort pour accepter de sortir de sa zone de confort. Certaines sections nous coupent de la civilisation pendant une semaine. Ce qui veut dire enchaîner plusieurs jours sans se laver, à moins de trouver une rivière. Pour dormir, on doit soit bivouaquer dans sa propre tente, soit trouver une « hut » (une sorte de refuge non gardé avec le strict minimum, ndlr), ou un camping, plus nombreux sur l’île du nord », ajoute Dylan.
Autre avantage du Te Araroa : il peut être parcouru par section. Rien n’oblige à se lancer, d’une traite, sur les 3000 kilomètres du sentier. « On peut le traverser en plusieurs fois, ou par exemple choisir de ne faire que la section sur l’île du nord ou celle sur l’île du sud. S’il y en avait qu’une seule à choisir, je recommanderais celle du sud. C’est plus sauvage. Au nord, on rencontre plus de villages, de villes, et de passages qui empruntent la route au lieu de la pleine nature », confie-t-il.
Entre 3500 et 5000€ de budget
Lui-même avoue n’avoir parcouru « que » 2000 kilomètres sur le total. « J’ai très vite été confronté à un problème que je n’avais pas anticipé… le budget. J’ai débuté le sentier depuis le point le plus au nord, et quand je suis arrivé au niveau d’Auckland, j’ai compris que financièrement, je n’allais pas y arriver. J’ai décidé de laisser derrière moi une bonne partie de l’île du nord, et de rejoindre directement l’île du sud. Et là, je me suis rendu compte qu’il ne me restait que 200$ sur mon compte. Je me suis arrêté pour travailler pendant deux semaines, histoire de renflouer tout ça. »
« Pour assurer ses arrières, quand on veut faire le trail dans son entièreté, je conseillerais de prévoir entre 3500 et 5000€ », déclare Dylan. « Quand on part marcher en pleine nature, on ne pense pas forcément avoir besoin d’un gros budget. Mais il faut compter la nourriture, parfois des nuits en auberge, le « Hut pass » pour avoir le droit de dormir dans les refuges sur le sentier, prévoir éventuellement le remplacement de son matériel (chaussures et tentes qui s’usent sur une telle distance). Sur l’île du nord, il faut savoir que l’on a plus tendance à dormir dans un camping. Il faut aussi compter les shuttle-taxis, des espèces de navettes qui font la liaison entre le trail et les villes pour se ravitailler en nourriture. Sans oublier le ferry entre les deux îles. »
Minimum 3 mois de marche
De ce voyage, Dylan Moron retient autant les paysages que les rencontres enrichissantes avec les autres randonneurs. De quoi l’inspirer pour tourner, pendant son périple, le documentaire « Up and Down », valorisant surtout ses rencontres avec six marcheurs aux histoires touchantes et percutantes. Parmi eux, une femme de 62 ans, ayant subi une ablation de l’un de ses poumons durant son enfance, qui tenait à relever le défi de parcourir le Te Araroa. « Son parcours montre bien que le trail est accessible à tous. Tout dépend du temps que l’on décide d’y accorder. Elle a mis six mois à tout traverser, elle a juste pris un peu plus de temps que les autres mais elle a réussi. En moyenne, il faut compter entre trois et cinq mois pour le faire d’un bout à l’autre », rapporte-t-il.
Ce périple lui a aussi permis de s’improviser réalisateur pour la première fois. « J’ai énormément appris sur le trail, à tout point de vue. Avant, j’étais vendeur de téléphone ; maintenant, j’essaye de vivre de ma passion pour la photo. J’aimerais aussi continuer sur la voie de la réalisation de documentaires d’aventures. Mon prochain projet serait de faire un nouveau film, plus local, peut-être en France ou en Europe ». Ce premier documentaire est néanmoins très prometteur : une réalisation altruiste et généreuse, qui pêche peut-être parfois au niveau du son, faute de moyens, mais qui laisse majoritairement la place aux récits des autres randonneurs – tous aussi humbles que Dylan, qui toujours reste discret derrière la caméra, préférant se fondre dans des paysages sublimes. Son objectif, à l’écriture de ce film, était de nous inciter, nous aussi, à tenter cette aventure. C’est réussi !
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Article initialement publié le 22 avril 2021, mis à jour le 17 mai 2021.
Photo d'en-tête : Dylan Moron