Il n’a que 19 ans. Mais son nom ne vous est pas inconnu. Normal, c’est le champion olympique d’escalade en titre – nouvelle discipline inscrite aux JO cette année. Figure marquante de la jeune génération de grimpeurs, il s’inscrit dans une longue lignée d’athlètes qui au fil des années ont trouvé leur place dans la team La Sportiva. Rencontré à l’occasion du meeting annuel des ambassadeurs de la marque, début octobre, dans la vallée de l’Orco, en Italie, l’Espagnol Alberto Ginés López se livre comme jamais. Secrets de sa réussite aux JO, relations avec son mentor, Adam Ondra, objectifs pour Paris 2024… interview exclusive d’un champion en passe de prendre le relais des plus grands.
Derrière les performances d’Alberto Ginès, grimpeur qui a décroché l’or à Tokyo cette année, peu de gens savent que se cache une équipe. Son coach bien sûr, mais aussi une team. Sans surprise, le jeune prodige espagnol a très tôt rejoint celle de La Sportiva, leader sur le marché des chaussons d’escalade et la chaussure d’alpinisme. Un choix qui sonne comme une évidence au regard de l’expérience technique de la marque italienne – présente sur le marché depuis 1928 et toujours entre les mains de la famille fondatrice, les Delladio – mais pour l’Espagnol, le latin qu’est Alberto, nul doute que le côté « familia latina » a joué, comme nous avons pu le constaer lors du La Sportiva Athletes Climbing Meeting, organisée du 11 au 13 octobre 2021. Pendant trois jours une trentaine d’athlètes venus des quatre coins de la planète ont pu se rencontrer et partager leur expérience dans l’environnement unique de la Vallée de l’Orco, paradis italien de l’escalade en fissure͘.
Parmi les participants, plusieurs générations unies autour d’un même passion pour le monde vertical. Les principaux représentants de la discipline Trad, bien sûr : Jacopo Larcher, Barbara Zangerl, Siebe Vahnee et Brittany Goris, en provenance des États-Unis où ce type d’escalade est très répandu͘. Mais aussi de nombreux jeunes espoirs de l’escalade sportive : notamment le Suisse Sascha Lehmann ou l’Allemande Martina Demmel, sans parler d’Alberto Ginés López, encore sous le choc (médiatique) de sa médaille d’or olympique en escalade. Pour ces grimpeurs de la nouvelle génération, c’est l’occasion d’élargir leurs horizons, de grandir et de se mettre au défi en marchant sur les pas de la génération qui les a précédés. Quand, pour les plus expérimentés, en catégorie Trad comme en Sport, c’est une façon de respirer l’air des grimpeurs d’aujourd’hui et de mieux comprendre l’évolution rapide de ce sport.
L’escalade en fissure et le trad climbing étaient bien sûr à l’honneur cette année, les falaises de granit de la Vallée de l’Orco s’y prêtant à merveille. Alberto Gines Lopez, plutôt spécialiste de la difficulté, s’est retrouvé, lui, en terra incognita. Il a donc pu s’ouvrir à cette discipline, avec l’aide précieuse de son mentor, l’Espagnol, Iker Pou, 44 ans, un des meilleurs grimpeurs au monde, 42,662 ascensions dans son CV. Ensemble ces deux générations ont ouvert une nouvelle voie caractérisée par des sections très techniques et d’autres typiques du bloc. Ils l’ont appelée « Fessura dura dura » (fissure dure dure) dans la falaise « Atlantide ». C’est dire si, pour Alberto ,l’expérience l’a conduit à repousser ses limites ! Excitant pour un jeune grimpeur qui est déjà allé très loin lors des Jeux Olympiques, comme il s’en explique dans l’interview qu’il nous accordée.
Interview Alberto Ginés López : « C’est le mental qui fait la différence »
Ça fait quoi d’être le premier champion olympique de l’histoire de l’escalade ?
Je suis très heureux et j’avoue être un peu fier car cette année était un moment historique : à Tokyo l’escalade rentrait aux Jeux Olympiques. Mais rien n’était écrit d’avance. En fait, mon plus gros objectif sur cette compétition était d’arriver en finale, donc je n’ai jamais pensé un jour que je pourrais remporter la médaille d’or. Bien-sûr, j’avais un mental de gagnant, j’y croyais, mais au fond de moi je pensais que la victoire serait plus abordable à Paris (JO 2024, ndlr).
Quel a été l’impact des JO sur ta vie ?
Après les Jeux Olympiques, ma vie a totalement changé, tant sur les réseaux sociaux que dans mon quotidien. Les gens me reconnaissent dans la rue, ce qui avant Tokyo n’arrivait jamais. Même si c’est un peu bizarre et un peu déstabilisant parfois, honnêtement c’est agréable d’avoir un peu de reconnaissance.
Tu n’étais pas le favori pour le titre ni même pour le podium. Selon toi, à quoi est due ta victoire à Tokyo ?
Je ne sais pas (rires). Très certainement parce que j’ai gagné l’épreuve de vitesse, ce qui était assez inattendu. Les favoris de la discipline, le Français Bassa (Mawem) et le Japonais Tomoa (Narazaki) n’ont pas pu s’exprimer à leur réel niveau, pourtant ils sont meilleurs que moi. En général, leurs temps sont bien en dessous des miens mais Bassa s’est blessé lors des qualifications et Tomoa a zippé en finale. Alors je reconnais que j’ai eu un peu de chance, mais bon c’est le jeu de la compétition. J’avais tout misé sur l’entraînement en difficulté et en vitesse. Je suis content de mes performances car le plus dur a été de gérer la pression après ma victoire sur la vitesse. Autre chose qui a fait, je pense, la différence, c’est qu’avant les Jeux, j’ai été encadré en préparation mentale car je me suis mis énormément la pression pour être fort sur cet événement, je n’arrêtais pas d’y penser ce qui m’a parfois paralysé pendant la saison. Souvent en Coupe du monde, je finissais parmi les premiers des demi-finales, mais une fois arrivé en finale, je m’effondrais mentalement ce qui nuisait à ma performance. Travailler mon mental avec une professionnelle m’a énormément aidé. Elle m’a fait comprendre qu’il fallait que je me concentre sur une unique chose : le plaisir de grimper, d’être sur les compet’.
Pour ces Jeux, on a pu voir que tu t’étais entraîné avec Adam Ondra. Qu’as-tu appris avec lui ?
Adam m’a transmis une chose essentielle : la motivation à l’entraînement. Il donne toujours le meilleur de lui-même, facile à faire en compet’ car chacun veut être le meilleur, mais à l’entraînement, c’est plus difficile. Quand tu passes du temps sur le pan, plusieurs fois par semaine, il faut réussir à se booster et parfois, quand on s’entraîne seul, c’est dur, car l’émulation n’est pas là pour nous pousser à aller au-delà de nos limites. Mais pourtant, c’est tout ce qui fait la différence entre celui qui performe et les autres. Adam, il s’entraîne toujours comme s’il était en compétition, avec la même énergie et le même désir d’aller au bout de lui-même. Et ça c’est vraiment chouette !
Ça fait quoi d’avoir battu Adam Ondra, la légende, l’idole de plein de grimpeurs ?
Je ne suis pas meilleur qu’Adam. J’ai simplement été plus fort que lui sur une compétition. Mais c’est tellement aléatoire, il y a tant de paramètres à gérer. Adam et Tomoa étaient les favoris sur cette compétition, mais tout peut arriver; comme à Tokyo. Adam est toujours le meilleur grimpeur du monde, même s’il n’est pas champion olympique. J’ai un énorme respect pour lui, pour ses performances et pour tout ce qu’il a pu apporter à l’escalade.
Tu prévois de participer aux Jeux de Paris 2024 ?
Bien-sûr, je veux me qualifier pour Paris. Le format de compétition sera différent avec deux épreuves : un combiné bloc/difficulté et d’un autre côté la vitesse. Pour moi, ça sera plus intéressant. Je pourrais ainsi me concentrer sur le bloc et la difficulté en oubliant la vitesse. Je pense que j’ai une grosse marge de progression en bloc car c’est la discipline que j’ai laissé un peu de côté lors de ma préparation olympique. J’espère qu’aux Jeux de Los Angeles, en 2028, la difficulté sera une seule discipline car c’est là-dessus que j’aimerais vraiment me focaliser. Mais au final, peu importe le format de la compétition, avoir la chance de grimper aux Jeux Olympiques, c’est quelque chose d’incroyable.
Quels sont tes prochains objectifs ?
Mis à part les futurs Jeux Olympiques, j’ai vraiment envie de me concentrer sur le circuit de la Coupe du Monde. J’aimerais pouvoir la gagner. Sinon, en dehors de l’escalade, il faudrait que j’arrive à terminer mes études (rires). Ah oui, aussi je voudrais mettre de bons combats dans « La Rambla »(voie située à Siurana, en Espagne, cotée 9a+, ndlr) et pourquoi pas réussir à l’enchaîner. Mais en tout cas, il va falloir que je fasse des choix car je n’ai pas envie de m’éparpiller dans mes objectifs.
Pendant cet événement organisé par La Sportiva, tu as pu tester l’escalade en terrain d’aventure, une discipline qui nécessite la pose de coinceurs. C’était une première pour toi. Alors, c’est si différent de ta pratique habituelle ?
C’est vraiment un autre sport ! En fait, contrairement à l’escalade sportive, en terrain d’aventure tu n’es jamais vraiment sûr d’avoir le droit à la chute. Par exemple, lors de mon premier jour d’essai, je suis tombé de 10 mètres. Mais c’était de ma faute : j’avais mal placé un coinceur qui n’a pas résisté à l’impact. Une première expérience terrifiante ! Tout s’est passé très vite et je n’ai pas vraiment eu le temps d’avoir peur. La gestion de la peur est un peu la même qu’en escalade sportive : si tu as confiance en toi et que tu essaies de ne pas penser à la chute, les choses vont très bien se passer. Aujourd’hui, j’ai vraiment réussi à m’exprimer en terrain d’aventure, j’ai fait la première ascension d’une voie autour de 7c. Mais au-delà de la cotation, j’ai vraiment aimé grimper, c’est le plus important. Bon, je ne dis pas que je vais me reconvertir au terrain d’aventure, mais j’aimerais bien en refaire de temps en temps.
Mise à part la grimpe, quelles sont tes autres passions ?
Les études (rires), même si pour l’instant je n’y vais plus trop… et jouer à League of Legend ! Après, l’escalade a toujours été dans ma vie, mon père est grimpeur, alors de mon côté, j’ai commencé à trois ans. Vu que j’ai directement adoré ce sport, j’ai toujours baigné dans le milieu de la grimpe, j’ai toujours fait ça. Même si avant, en plus de l’escalade, je faisais de la gym, mais il a fallu faire un choix car je ne pouvais mener les deux de front. Vu que j’étais meilleur en escalade, la décision a été vite prise.
Quelle est ta falaise préférée en Espagne ?
Margalef (près de Tarragone, en Catalogne, ndlr). Sinon ma voie préférée est située à Rodellar (dans la province de Huesca, dans l’Aragon, ndlr), c’est « Cosi Fan Tutte », un 8c+ de 50 mètres, de l’endurance pure et un vrai voyage au-dessus d’une rivière. C’est incroyable.
Les chaussons d’Alex Honnold et Tommy Caldwell réédités
Lors de l’événement La Sportiva, Alberto, comme une trentaine d’athlètes sponsorisés par la marque, a pu tester la version modernisée des « TC Pro », chaussons d’escalades iconiques dédiés aux grandes voies alpines et à l’escalade en fissure, utilisés notamment par les Américains Alex Honnold et Tommy Caldwell. Un examen minutieux permet d’ailleurs de discerner, estampées à chaud sur la partie supérieure de l’empeigne en similicuir, leurs ascensions les plus emblématiques, Free Rider, racontée dans le film « FreeSolo », et « The Down Wall ». Un modèle, donc, qui a fait ses preuves. Avec une coupe haute pour protéger la cheville, une bordure en caoutchouc et un système de laçage sur la pointe, le pied est en effet protégé des frottements du rocher. Deux technologies permettent par ailleurs à ces chaussons de durer dans le temps : le système d’enrobage P3, conçu pour maintenir leur cambrure, et le Vibram® XS Edge composant la semelle pour réduire leur déformation sur des petites prises. Enfin un confort maximal est garanti par les rembourrages internes situés dans la zone des malléoles et dans la zone avant.
Pour en savoir plus sur le modèle TC Pro de La Sportiva, visitez lasportiva.com
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