Il y a des instants magiques, où le temps est suspendu et où tout est possible : même s’introduire sur la lune, une nuit d’hiver, à 100 mètres de haut, en équilibre sur une highline de 90 mètres de long. C’est la prouesse réalisée dans les Pyrénées par le highliner Philippe Soubies, recordman du free solo de 300 m, capturée dans un petit film qu’on n’a qu’une envie : partager.
Le film ne fait que 1 minute 37 secondes. Mais il semble durer une éternité, tant on aimerait que cet instant dure toujours. Léger, aussi mince que le câble auquel sa vie est suspendue, le highliner Philippe Soubies s’est offert un aller-retour sur la lune le 29 novembre dernier dont le bilan carbone devrait faire pâlir la NASA. En équilibre à 100 mètres de haut, à Etxauri, dans les Pyrénées, on l’y voit porter l’astre lumineux, fragile Atlas, seul dans la nuit. Et puis s’y introduire, promeneur silencieux.
Comme souvent dans les exploits les plus extrêmes, le geste est fluide, et semble facile. Or derrière cet instant magique se cache une pincée de hasard et des jours de repérages, comme l’explique l’association Slackline Pays Basque, à l’origine de cette aventure poétique mais aussi très technique.
« Le projet est né d’un heureux hasard : le 21 novembre 2020 nous prenions par hasard la photo de l’un de nos membres (Lorenzo Etchenique) devant une demi-lune à Peñartea, un petit site d’escalade en Navarre. Nous avons rapidement vu un vrai potentiel dans ce cliché. Le week-end suivant, la pleine lune était présente et la météo au rendez-vous. Nous nous sommes donc mis à la recherche d’un site qui présenterait un alignement photographe-highline-lune parfait. Nos calculs ont fait ressortir Etxauri ! Highline magnifique de 90m de long à 100m de haut. Ancrages naturels. Posée deux fois seulement par le passé. »
Ne restait plus qu’à concrétiser le projet qui s’est déroulé sur trois jours, racontent les highliners.
28/11/2020 : repérage et début de l’installation
« Escalade exigée et exigeante : 4 longueurs d’un côté (100m) et 1 longueur de l’autre (30m). Le tout avec le matériel nécessaire. Les ancrages sont installés mais la corde utilisée pour tirer la ligne d’un coté à l’autre est rabattue par le vent et se bloque sur la paroi. Il fait nuit et nous sommes donc contraint de redescendre.
28/11/2020 : fin de l’installation et prise du cliché
Déblocage de la corde et fin de l’installation dans la matinée. L’après-midi tout le monde essaie la ligne. Enfin, le soleil se couche et le moment attendu approche. Thomas Meurot, (le photographe, ndlr), s’est positionné 1km plus loin dans un champ en contre-bas à l’endroit calculé. Philippe (Soubies, ndlr) est en position sur la ligne. L’attente commence et la tension monte. Après 1h d’attente la lune sort de derrière la falaise. L’alignement est bon! La lune cavale à toute allure (tout se passe en moins de 3 minute) mais la rencontre a été capturée!
29/11/2020 : deuxième tentative ratée
Nous voulons prendre de nouveaux clichés avec cette fois Alex sur la ligne. Comme le jour précédent, après une attente angoissante, la lune sort finalement. Mais elle est trop basse… Le temps de se repositionner il est déjà trop tard. Nous nous consolons grâce aux super clichés prix la veille.
30/11/2020 : fin du périple
La ligne est désinstallée et tout le matériel redescendu. »
Au final, conclut l’équipe de highline, « La difficulté principale du projet était qu’il fallait capturer la lune au moment où elle apparaissait. Il n’était pas possible d’anticiper sa trajectoire dans le ciel. Tout reposait sur nos calculs. L’installation de la ligne était, elle, l’une des plus vertigineuses et physiques que nous avons entreprise, due à la quantité importante de matériel qu’il nous fallait transporter en grimpant. »
Les superbes photos de Thomas Meurot sont en vente ici. Leurs bénéfices seront reversés à l’association Slackline Pays Basque qui a monté ce superbe projet.
Photo d'en-tête : Thomas Meurot