C’est une régression environnementale de 35 ans à laquelle on assiste aujourd’hui. Avec la Loi d’Orientation Agricole (LOA), votée le 28 mai à l’Assemblée nationale, le gouvernement « vient de porter une atteinte immense à la protection des êtres vivants appartenant à des espèces protégées, faune et flore », alerte Sea Shepherd. Avec l’ONG connue pour sa combativité, pas moins de 35 associations de défense de l’environnement demandent donc le retrait de l’article 13, présenté comme « un séisme juridique ». Un article qui laisse les pollueurs agir en quasi impunité et qui peut impacter tous nos espaces naturels. En montagne, comme en mer, partout en France.
De quoi s’agit-il ?
Remaniée après les manifestations d’agriculteurs du début d’année, la Loi d’Orientation Agricole mise sur la « simplification » au détriment des normes environnementales (LOA). Qu’on en juge : à l’article 13, amendement 4452 2e rectificatif, adopté à l’Assemblée nationale le 28 mai (en relecture ce mois-ci au Sénat), il est décidé que désormais seules les atteintes “intentionnelles” seront passibles de poursuites pénales pour destruction d’espèces protégées. « Pour être constitutionnel, le gouvernement n’a pas pu limiter son amendement aux seules activités agricoles. Il est valable pour toute activité humaine. », précise Sea Shepherd dans un communiqué diffusé hier, jeudi 6 juin.
Cet article remet en cause un texte vieux de 35 ans (Code rural art 215-1, version du 4/11/1989) qui consacre la première condamnation pour destruction d’espèces protégées.
Pourquoi cela pose problème ?
« L’intentionnalité est quasi-impossible à démontrer et ce sont bien les négligences, imprudences, manquements à une obligation de prudence qui entraînent aujourd’hui les poursuites et les condamnations concernant les espèces protégées. Qui plus est, le critère de l’intentionnalité conditionnera l’engagement de poursuites. Un procureur ne va pas poursuivre s’il sait que la condamnation a peu de chances d’aboutir. », souligne Sea Shepherd.
« De plus, le fait d’exécuter une obligation légale ou réglementaire, ou encore de se conformer à une prescription administrative, comme un plan de gestion forestier par exemple, n’est pas considéré comme une atteinte intentionnelle. »
Qu’est-ce qui sera affecté ?
La faune sauvage terrestre, mais pas que, explique Sea Shepherd. « Pour la vie marine, les répercussions d’un article aussi irresponsable seront catastrophiques dans le cadre notamment de projets d’usines éoliennes offshore portant atteinte aux espèces et habitats protégés, ou de tout autre projet industriel en mer situé sur ou à proximité de zones sensibles. Il s’agit là littéralement d’un « permis de détruire le Vivant » en toute impunité. « A l’heure de la sixième crise d’extinction massive, provoquée par les activités humaines, un tel article fait office de véritable déclaration de guerre au Vivant et aux générations futures » , s’insurge l’ONG.
Concrètement qu’est-ce que cela veut dire pour les industriels, les agriculteurs, les promoteurs ou les chasseurs ?
« Tout simplement que les agriculteurs ne subiront pas de sanction pénale s’ils détruisent des espèces protégées en cas de taille de haie, d’utilisation de pesticides, d’épandage de lisier, de débordement d’une cuve de méthanisation, d’écobuage, etc. Un forestier pourra détruire des arbres, comme des arbres à cavité, contenant de précieuses espèces protégées, s’il le fait selon le plan de gestion forestier.
Mieux encore, un chasseur qui détruit une espèce protégée sans le faire volontairement, un promoteur immobilier qui rase un terrain comportant des espèces protégées, par négligence, une commune qui entretient des routes et coupe des arbres en période de nidification, ou dont la station d’épuration fuit par accident et pollue un cours d’eau, un particulier qui épand un produit phytosanitaire dangereux sans faire attention, détruisant par là même toute la petite faune autour de chez lui… dans tous ces cas, la “bonne foi” sera avancée et il faudra au contraire prouver la volonté de détruire les espèces protégées. »
35 associations, dont Sea Shepherd France et France Nature Environnement, ont lancé une pétition dénonçant l’impunité future qui sera accordée en cas de destruction des êtres vivants appartenant à des espèces protégées. Elle compte déjà 31 000 signatures.
Voir la pétition : ici.
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