Du 25 novembre au 1er décembre, l’ONU va finaliser un texte d’ampleur : le traité mondial contre la pollution plastique. Étudié par les 193 États membres depuis 2022, il devrait prendre forme fin 2024 à l’issue d’une dernière session de négociations. Au Népal, les défenseurs de l’environnement tirent la sonnette d’alarme : dans le brouillon, déjà très abouti de ce texte, nulle mention de la montagne, pourtant au cœur du problème.
Le plastique est partout. Dans l’océan, sur les plages, les fleuves mais aussi en montagne, des Alpes aux Pyrénées, en passant par l’Himalaya et les calottes glaciaires des pôles. Ces nanoparticules de microplastique, charriées par les vents et la pluie, rentrent dans le cycle de l’eau. Et sont donc transportées sur les plus hauts sommets du monde. À savoir que malgré les politiques publiques de réduction des déchets, « 80% des plastiques émis ne sont pas recyclés et restent sur Terre » précise France Info.
La montagne, absente du futur traité de l’ONU
« La pollution plastique est, au même titre que le changement climatique et l’érosion de la biodiversité, une crise planétaire » précise l’ONU. « Afin de lutter contre la pollution plastique à l’échelle internationale, la cinquième Assemblée des Nations unies pour l’Environnement (ANUE-5) a adopté en mars 2022 une résolution historique en vue de négocier, d’ici fin 2024, un traité mondial de lutte contre la pollution plastique ».
Et si la cinquième (et ultime) session des négociations pour aboutir à l’adoption de ce traité devrait débuter le 25 novembre à Busan, en Corée du Sud, les défenseurs de l’environnement alertent sur un point crucial : la nécessaire préoccupation de la pollution plastique en haute montagne. « Malheureusement, le mot ‘marin’ est à ce jour mentionné 47 fois dans le traité. Contrairement à ‘montagne’, qui en est absent [un point que l’on peut vérifier en lisant le dernier brouillon du traité, disponible ici, ndlr] », a souligné Ram Sah, directeur exécutif du Centre pour la santé publique et le développement environnemental (CEPHED), situé au Népal. « Le futur traité se concentre uniquement sur la pollution marine, ignorant complètement les préoccupations liées aux montagnes, bien que notre gouvernement [népalais, ndlr] ait soulevé cette question par écrit lors des quatre précédentes réunions du Comité intergouvernemental de négociation (CIN). Cependant, le traité n’en fait aucunement mention ».
Les microparticules dans la neige, facteur d’accélération du changement climatique
Ram Sah a notamment précisé à l’Himalayan Times que des échantillons de neige avaient été prélevés sur les pentes de l’Everest, à 8 440 mètres d’altitude. Ces derniers ont été soumis à un test de présence de microparticules de plastique. Qui se sont avérés positifs. « On a tendance à penser que l’environnement de l’Everest est l’un des plus purs au monde, ce n’est pas le cas » souligne-t-il. « On est donc indispensable de lutter contre ce qu’il se passe en amont, en montagne, si l’on souhaite s’attaquer à la question de la pollution marine ». Si les neiges fraîches et propres ont un albédo élevé – – la capacité d’une surface à réfléchir la lumière solaire – (environ 80 %), les neiges contaminées par les microparticules de plastique absorbent davantage les rayons du soleil. Résultat : la neige fond plus rapidement, exposant des surfaces plus sombres comme le sol ou la glace, qui absorbent davantage de chaleur, accélérant ainsi le réchauffement climatique.
Et la fonte accélérée des neiges due à la présence de microplastiques perturbe les cycles hydrologiques locaux et régionaux. Une fonte plus rapide peut entraîner une augmentation des inondations, une modification des régimes fluviaux et une diminution des ressources en eau douce à long terme, exacerbant les effets du réchauffement.
En parallèle, les microplastiques impactent la faune locale, perturbant les chaînes alimentaires et affectant des espèces essentielles à la régulation des écosystèmes qui influencent le climat. Aussi, les microplastiques agissent souvent comme des vecteurs pour d’autres polluants chimiques (métaux lourds, hydrocarbures, pesticides), amplifiant les effets néfastes sur les environnements où ils se déposent, y compris dans les neiges des régions polaires.
« Nous devons donc faire entendre la voix des montagnes lors de la cinquième réunion de l’ONU dans le but d’inclure la question de pollution plastique sur les plus hauts sommets du monde dans le prochain traité », a déclaré Ram Sah, qui appelle à une collaboration entre les pays concernés afin que la question soit soulevée par l’ONU à partir du 25 novembre.
Photo d'en-tête : Sylwia Bartyzel