Thomas Ballet, Manu Cornu, les frères Mawem, Guillaume Moro, tous ces grimpeurs, parmi les meilleurs français, ont participé à « Ninja Warrior », une émission TV de parcours d’obstacles. Avec le recul, un constat est clair : les meilleurs concurrents sont des adeptes de l’escalade. Comment l’expliquer ? Réponse de Jean Tezenas du Montcel, tenant du titre, présent ce soir à 21h05, pour la finale sur TF1.
A 27 ans, le Haut-savoyard originaire de Sallanches, Jean Tezenas du Montcel, n’est pas un nouveau venu. Présent depuis l’introduction en France en 2016 de l’émission adaptée du programme japonais Sasuke, il l’a remportée l’année dernière. Il rempile donc pour cette quatrième saison dont le dénouement sera connu ce soir. À la clef ? 20 000 euros pour le gagnant, récompense qui n’existe que depuis cette année, auparavant il n’empochait aucune mise. Mais la somme peut monter jusqu’à 100 000 euros si la dernière épreuve, la « Tour des héros » – une corde de 23 mètres à grimper en moins de 30 secondes – est réussie. Seules six personnes au monde en sont venues au bout ; aucune en France, où Thomas Ballet (vainqueur en 2017) est l’unique à l’avoir tentée.
A la veille de la diffusion de la finale, interview de Jean Tezenas du Montcel.
Si tu devais résumer « Ninja Warrior » en deux mots ?
Variété et difficulté. En fonction des années, les épreuves changent un peu, mais on reste sur la même idée. En qualification et en demi, il y a un parcours de 5 obstacles à réaliser le plus vite possible. Les meilleurs sont sélectionnés à chaque étape pour s’affronter en finale.
Pour la phase ultime, c’est assez différent, et beaucoup plus dur physiquement. Il y a trois parcours qu’on enchaîne et que l’on doit réaliser dans un temps imparti. Cela permet d’être plus sélectif. L’année dernière, je suis celui qui est allé le plus loin, mais je n’ai pas terminé le troisième parcours.
Les parcours d’obstacles deviennent de plus en plus populaires, mais tu viens d’un univers très différent.
Les émissions télé et les parcours d’obstacle sont effectivement très éloignés de ce que je fais à l’origine. Moi, j’aime bien me définir comme un passionné de montagne. J’ai commencé par l’escalade puis, à mon arrivée à Annecy, j’ai diversifié avec l’alpinisme, les cascades de glace. Tout récemment, je me suis mis au parapente. Ingénieur produit pour un grand groupe français de sport, je baigne dans le milieu en permanence.
Comment en es-tu arrivé à participer à cette émission ?
Dans le cadre de mes études, j’ai vécu en Chine, à Shanghai (où ce programme est très populaire, ndlr). J’étais dans un groupe Facebook d’escalade où quelqu’un a mis un message en expliquant qu’il cherchait des candidats pour participer à « Ninja Warrior ». J’ai tenté le coup. Puis quand je suis rentré en France, j’ai partagé la vidéo sur les réseaux sociaux. L’émission est finalement arrivée dans l’Hexagone et j’ai simplement postulé en envoyant mon passage dans la version chinoise. Ils ont directement accroché. Sans mon aventure chinoise, il n’y aurait eu aucune chance que j’entende parler de l’émission. Je ne suis pas vraiment du genre à regarder ces programmes.
Dans le milieu de la montagne, comment est-ce perçu ?
Je pense qu’il y a une bonne partie de passionnés de montagne ou de grimpe qui ne connaissent pas le jeu et que ça n’intéresse pas. Mais bizarrement, quand on regarde les concurrents de ces quatre premières saisons, il y a aussi beaucoup de grimpeurs. Thomas Ballet, les frères Mawem, Guillaume Moro, Manu Cornu, les meilleurs Français s’y sont essayés, c’est donc qu’il doit y avoir aussi un côté attractif, l’esprit de compétition rentrant en jeu. Quand tu vois tes potes tenter leur chance, tu as envie de voir ce que tu vaux.
Avec le recul, on s’aperçoit que ceux qui vont le plus loin, et remportent souvent l’émission, sont justement des spécialistes d’escalade. Comment l’expliques-tu ?
C’est une très bonne remarque, et pour être honnête on se dit la même chose entre tous les participants. Pendant l’émission, entre les épreuves, on discute pas mal entre nous, on débriefe sur les parcours, les obstacles, et on en arrive toujours à cette même conclusion : les qualités de grimpe sont quasiment essentiellement pour aller loin dans « Ninja Warrior ».
Quelles sont les qualités les plus importantes ?
Pendant mes quatre participations (la saison 4 a été tournée fin mars début avril, il s’agira donc, ce soir, d’une diffusion en différé, ndlr), j’ai ciblé trois caractéristiques importantes et une dernière essentielle. Toutes ne sont pas directement en lien avec l’escalade, mais un bon grimpeur possède généralement les quatre.
- L’agilité : disons qu’il en faut un minimum. Ce n’est pas nécessaire d’être ultra agile, mais ça aide, surtout sur les premiers parcours où certains obstacles sont orientés là-dessus. Celui qui fait un peu de montagne n’a généralement pas trop de problèmes.
- La capacité de se balancer efficacement : c’est parfois sur ce point que les grimpeurs sont un peu défaillants. Prendre un bon élan et avoir le bon timing, c’est essentiel pour certains obstacles. Plusieurs très forts grimpeurs sont tombés dans ce genre de situation.
- Le grip et la force dans les bras : c’est là où le fait de pratiquer l’escalade est un gros avantage, surtout en finale. Autant les qualifications et les demi ne sont pas trop dures physiquement, autant la finale est un enchaînement de parcours très physique, particulièrement pour les bras. Généralement les bons grimpeurs ont un rapport poids/puissance bien au-dessus de la moyenne, ce qui aide énormément pour passer les obstacles malgré la fatigue accumulée.
- Enfin, le dernier point, sans doute le plus important de tous : la lecture du parcours. À titre personnel, je ne suis pas le plus fort fort physiquement ou techniquement, même si le fait de grimper depuis pas mal d’années m’aide. Je pense que c’est dans la lecture que j’arrive à tirer mon épingle du jeu. Il faut réussir à anticiper les obstacles, à imaginer où s’agripper ou comment il va bouger si c’est une échelle mouvante par exemple. Généralement les grimpeurs sont bons sur ce point : ils ont l’habitude de se projeter sur une jetée, sur la réception sur la prise, sur la position des pieds pour être plus efficaces, etc.
Néanmoins, faire de l’escalade n’est pas une garantie de réussite. Il ne faut pas être trop sûr de soi, il y a eu beaucoup de surprises de très forts concurrents qui sont tombés au premier ou au deuxième obstacle en pensant que ce serait facile.
Sans spoiler, que doit-on attendre de la grande finale de ce soir ?
C’est probablement la meilleure depuis le début de l’émission en France, car le montage est bien mieux réalisé cette année. Ça rend l’émission plus intéressante à regarder, selon moi. Et, s’agissant de la finale, le scénario est fou. Les spectateurs devraient apprécier.
Retrouvez l’émission, ce soir, sur TF1, à 21h05.
Photo d'en-tête : © TF1 Production- Thèmes :
- Escalade indoor