Heureux dénouement ce week-end pour deux des meilleurs alpinistes tchèques, Marek Holecek, Piolet d’or 2020, et son camarade Radoslav Groh. Depuis mardi dernier ils étaient prisonniers d’une tempête de neige sur le Baruntse, un sommet népalais de 7 129 m sur lequel ils avaient entrepris d’ouvrir une nouvelle voie dans la face nord-ouest, en pur style alpin.
« Nous attendons un miracle. Que Dieu nous aide à descendre de la montagne », écrivait jeudi le Tchèque Marek Holecek, piégé à près de 7000 mètres d’altitude sur le sommet népalais du Baruntse par le mauvais temps dû au cyclone Yaas impactant actuellement l’Everest. Le miracle s’est bien produit. Après neuf jours sur la montagne, les deux hommes, épuisés mais vivants, ont réussi à regagner le camp de base samedi. Non sans mal, comme l’explique Marek Holeck dont le téléphone satellite avait encore assez de batterie pour transmettre les dernières nouvelles à sa femme Klára, alias Kája, qui assure le relais sur Facebook : « Aujourd’hui, nous avons descendu 1 100 m dans une neige terriblement avalancheuse », explique-t-il . »Nous sommes dans une zone sure maintenant. Nos camarades ont probablement tout pris au camp de base, y compris la nourriture. Une autre nuit gelée nous attend « , ajoutait-il. Aussi, hier matin, dimanche 31 mai, les deux hommes ont-ils été transportés par hélicoptère à Katmandou, seul moyen de redescendre, compte tenu de la quantité de neige tombée. Toutes les expéditions dans cette zone ont d’ailleurs été annulées pour cette raison. Arrivés hier dans la capitale népalaise, Marek et Radoslav ont subi un check-up. Sur la photo postée hier par Marek, il apparait très éprouvé par le froid.
Quarante expéditions et plusieurs premières ascensions à son actif, ce guide de haute montagne de 47 ans, fait partie des meilleurs alpinistes de sa génération. Un parcours fulgurant, mené en totale autonomie financière – il finance seul ses expéditions – déjà couronné par deux Piolets d’or pour ses ascensions en compagnie de Zdenek Hák sur le Chamlang (2019) et le Gasherbrum I (2017). Interviewé en octobre dernier par Outside, le Tchèque qui a traversé d’autres moments difficiles, avec notamment la mort sous ses yeux, en 2013 de son partenaire Zdeněk Hrubý s’exprimait sur sa conception du danger : « Chacun d’entre nous est engagé dans une course pour la vie. Pour un temps limité. Et nous ne savons pas combien de temps cela va durer. Une chose est sûre : personne ne nous enlèvera jamais ce que nous réussissons à atteindre et à vivre. Notre vie est un livre dans lequel nous écrivons une histoire chaque jour. Et un jour arrive où une feuille reste vierge. Celui qui a une peur hystérique de sa mort a aussi peur de vivre sa vie. Quelles sont mes limites aujourd’hui ? Il est difficile de répondre à cette question. En fait, je ne cherche pas à les connaître. Une chose est claire : nous sommes fragiles, vulnérables et mortels. Cependant, vivre « on the edge », sur le fil du rasoir, là où seule l’obscurité attend l’erreur, donne aussi de l’intensité à la vie. Je dis haut et fort que je ne suis pas un joueur, j’aime la vie ! ».
Photo d'en-tête : Marek Holeček