Alexis Berg, photographe de référence dans le milieu de l’outdoor, vient de sortir en collaboration avec la plateforme Strava, “Nuit blanche”, un film qui se plonge dans les longues heures d’obscurité de l’UTMB 2019. Pendant sept minutes, il nous emmène en immersion dans la tête des coureurs, élites ou totalement anonymes. Le réalisateur nous en dit plus sur ce projet, qui va bien au-delà du trail.
Certains l’adorent, d’autres la détestent. La nuit effraie autant qu’elle fascine, et celles de l’UTMB ne font pas exception. Pour cette quatrième année de collaboration avec Strava sur l’événement, Alexis Berg a souhaité traiter ce sujet finalement peu abordé. Quand les coureurs de tête filent à toute allure à la lueur de leur frontale, la fin du peloton, qui passe deux nuits complètes sur les sentiers, vit la chose très différemment, au gré des hallucinations, des euphories et des sensations qui se mélangent.
Pourquoi avoir choisi d’aborder cette thématique ?
L’UTMB est un événement immense, international, qui est souvent abordé sous les mêmes angles : “la grande messe du trail”, “le combat des titans”. La nuit est paradoxalement un sujet très peu traité alors qu’en réalité tout se passe à ce moment-là. La course chez les élites se joue pour beaucoup pendant la première nuit, et pour le reste du peloton, certains ont couru au final plus de nuit que de jour.
L’autre raison est que je souhaitais choisir un thème suffisamment abstrait pour que le film ne parle pas qu’aux passionnés de trail. Ce n’est pas tant un film de trail, ou un film sur l’UTMB. C’est plutôt un film sur le rapport de l’être humain à la nature, à ses sensations dans un environnement où ses sens sont chamboulés.
Qu’y a-t-il de particulier pour un photographe ou un vidéaste, pendant la nuit ?
Gérer la nuit sur l’UTMB pour un photographe est assez délicat. En réalité, la majorité du temps, on a tendance à suivre les coureurs et coureuses de tête. Or, sur cette course, la problématique est que les premiers passent aux plus beaux endroits du parcours pendant la nuit. C’est forcément une frustration et ainsi, si on décide de suivre la tête jusqu’au bout, on loupe les plus beaux paysages, ceux qui font la magie du tour du mont Blanc.
Quelle est justement la plus belle partie selon toi ?
Sans aucun doute la partie italienne. L’arête du mont Favre, le lac Combal, les refuges de Bertone et Bonatti, la Grand Col Ferret, c’est juste incroyable. Or les premiers sont généralement déjà en Suisse lorsque le jour se lève (Pau Capell, vainqueur de l’UTMB 2019, a pointé à 6h00 du matin au Grand Col Ferret).
Dans ce film, il y a des témoignages de coureurs et coureuses. Comment les as-tu choisis ?
La chose importante pour moi était de ressembler à la course. L’UTMB est une course très internationale, on y trouve des profils divers. Je voulais retranscrire cette notion en interrogeant à la fois des coureurs rapides qui font un top 10 (comme Katie Schide, 6e cette année), et d’autres qui le sont moins comme David Penney, le chanteur du groupe Archive, qui a malheureusement abandonné à Arnouvaz (98e kilomète). J’ai essayé de varier les nationalités également.
J’ai réalisé certaines interviews en amont de la course, avec ceux qui avaient déjà participé à l’épreuve, et d’autres en aval. Je souhaitais aussi avoir ces deux perspectives.
Il y a un plan incroyablement esthétique dans le film, où l’on voit un faisceau de frontales qui zigzaguent. Peux-tu nous en parler ?
Ce plan est ce que l’on appelle un “timelapse”. C’est une succession de photos mises bout à bout, qui sont prises à intervalle régulier, ici avec un temps de pause long. Ce temps de pause long, c’est une technique qu’on utilise en astro-photographie, cela permet de capter la lumière même dans des environnements très sombres. C’est grâce à cela que j’ai réussi à obtenir ce contraste très fort entre l’obscurité et la lueur des frontales des coureurs.
Je me suis placé vers l’arête du mont Favre. C’est un endroit sublime où l’on a une vue magnifique sur le massif du Mont-Blanc. Cette année, on a eu particulièrement de la chance, car c’était une nuit claire, mais sans lune, ce qui permettait d’observer les étoiles de façon idéale. Un moment magique.
En tant que photographe et vidéaste, qu’est ce que représente pour toi la nuit ? C’est un moment que tu aimes particulièrement ?
J’ai toujours eu une attirance particulière pour la nuit, que ce soit en ville, en nature, particulièrement en montagne.
De manière générale, pour un photographe la nuit est un moment intéressant d’un point de vue créatif et photographique. Il y a beaucoup de contraintes qui nous obligent à trouver des manières de les contourner et stimulent notre créativité.
J’ai longtemps fait beaucoup de photos de nuit sur les événements, notamment en trail. Désormais, en fonction des courses, il m’arrive de plus en plus d’en profiter pour me reposer.
On te connaît surtout pour tes photos, mais tu réalises aussi des films. On pense à celui sur la Barkley. Ici, tu nous offres aussi des plans vidéo. C’est une évolution vers laquelle tu souhaites aller de plus en plus ?
En réalité, je filme depuis toujours, mais c’est vrai que je suis plus mis en avant pour mes photos. L’évolution du matériel permet aujourd’hui avec un même boîtier de faire aussi bien de la photographie que de la vidéo, c’est un gros avantage.
Mais de manière générale, je dirais que je reste plus habile en photo – même si la différence entre les deux est assez fine.
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