Les skieurs pro sont très remontés contre la Fédération International de Ski ces derniers jours. La cause ? Une succession d’accidents qui font des ravages parmi l’élite du ski. Trois grands noms sont déjà forfaits pour le reste de la saison. De quoi relancer le débat sur un calendrier de Coupe du monde alourdi par les reprises des épreuves annulées en début de saison. Trop, c’est trop, disent les athlètes.
« La saison est terminée, la saison de ski est terminée », a déclaré samedi Marc Jacob Strauss, le médecin de l’équipe norvégienne après la lourde chute d’Aleksander Aamodt Kilde, numéro deux mondial. Actuellement 4e du classement général de la Coupe du monde, le skieur a chuté à la fin de la longue descente de Wengen (Suisse) samedi 13 janvier. La course – remportée par le Suisse Marco Odermatt, devant le Français Cyprien Sarrazin – a alors été interrompue pendant plusieurs dizaines de minutes. Le temps qu’un hélicoptère évacue le skieur criant de douleur. Diagnostic : épaule déboîtée et coupure au mollet.
« J’espère que ça servira de leçon, et qu’on n’enchaînera plus jamais trois courses ici », a par la suite taclé le vainqueur, Marco Odermatt, dont le succès a été éclipsé par la lourde blessure du Norvégien. Car la redoutable piste du Lauberhorn a prélevé un lourd tribut parmi les grands noms du ski cette semaine. Vendredi, le Français Alexis Pinturault avait été contraint de mettre fin à sa saison.
La faute à une rupture du ligament antérieur croisé du genou gauche lors du Super-G, remporté par son camarade d’entraînement Cyprien Sarrazin. Le champion du monde du combiné de l’hiver dernier a été évacué par hélicoptère après une impressionnante chute à la suite d’un saut sur la piste la plus longue de la saison (4,5 kilomètres, pour la descente).
Fin décembre 2023, c’est l’Autrichien Marco Schwarz, l’un des grands favoris pour le gros globe de cristal, qui a dû faire une croix sur le reste du calendrier après avoir chuté dans la descente de la Coupe du monde de Bormio (Italie). En l’absence de ces trois grands noms – Schwarz, Pinturault, Kilde – le Suisse Marco Odermatt se retrouve donc sans concurrence, ou presque, en vue d’un troisième gros globe de cristal d’affilée en fin de saison.
« Il en a plein les pattes, il est cuit »
Avant et après la terrible chute du Norvégien samedi, beaucoup d’autres skieurs et skieuses ont multiplié les fautes, causant de nombreuses dégringolades aux conséquences moins graves. Ce qui, selon ce consultant pour Eurosport, n’est pas un hasard. « Si on prend l’exemple de Kilde, on voit qu’il skie bien tout le haut mais qu’il perd beaucoup en lucidité au fur et à mesure » explique-t-il. « C’est le skieur le plus physique du circuit mais dans la dernière courbe, il s’assoit. D’habitude, il se remet de ces situations parce qu’il a une force de dingue. Là, il n’a pas pu. Il n’a pas pu parce qu’il en a plein les pattes et qu’il est cuit. Il finit par faire une faute technique. La descente et le Super-G sont des disciplines très dangereuses. Aussi quand on y ajoute de la fatigue et une programmation dense, on prend un risque important d’envoyer des skieurs à l’hôpital ».
Car si la plupart des athlètes du circuit ont subi de nombreux pépins physiques au cours de leur carrière, l’enchaînement des blessures des grands noms de la discipline en moins d’un mois questionne. À savoir que la descente de samedi était la troisième course en autant de jours sur la piste de Wengen.
Pourquoi ? Le programme a été modifié, avec l’addition d’une course sprint, jeudi, par la Fédération internationale de ski (FIS) à la suite de l’annulation des premières courses de la saison, dont celle de Zermatt, en Suisse et de Beaver Creek, aux États-Unis. La faute à des conditions météo instables (forts vents). S’ajoute à cela l’exigence de la piste du Lauberhorn qui a piégé, samedi, de nombreux skieurs visiblement épuisés par la succession des épreuves.
« Ceux qui se plaignent n’ont qu’à faire des impasses »
Un enchaînement dicté par la FIS. « C’est la vie des descendeurs, mais aujourd’hui la chute d’Aleksander [Kilde, ndlr] pouvait être évitée », a ainsi pesté le Français Cyprien Sarrazin, 2e de la descente samedi, à l’arrivée. « Trois courses d’affilée, en finissant par la plus longue de l’année… Je ne suis pas passé loin de faire comme lui ».
Plusieurs fois alertée à ce sujet, la FIS, a répondu aux skieurs, leur indiquant qu’ils n’avaient « qu’à faire des impasses ». « En tennis, on fait des impasses » avait alors détaillé Michel Vion, secrétaire général de la fédération. « Ceux qui se plaignent n’ont qu’à en faire aussi en ski alpin ».
Une réponse insuffisante pour les athlètes concernés. « Les skieurs sont programmés pour faire la course : ils ont envie de participer, même s’ils sont cuits », souligne Pierre-Emmanuel Dalcin, ancien membre de l’équipe de France de ski. « Faire une impasse, à leurs yeux, c’est comme un refus d’obstacle. C’est très difficile d’en faire ».
Les athlètes vont donc continuer de subir. Puisque les courses continuent de s’enchaîner. Prochain rendez-vous dès vendredi 19 janvier, à Kitzbühel (Autriche). Suivi des épreuves de Garmish (Allemagne) fin janvier ou encore celle de Chamonix début février.
Photo d'en-tête : Erich Spiess- Thèmes :
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