Quand et comment reprendre les activités de plein air ? Si pour la course à pied et le vélo les options semblent enfin plus claires – comme nous l’expliquions dans notre article hier – certains sports de pleine nature, tels que l’alpinisme ou l’escalade, restent encore à organiser avant le 11 mai, date en ligne de mire après deux mois de confinement strict. Deux syndicats et une association de professionnels de la montagne ont mis au point un plan de de reprise détaillé assorti d’un protocole d’applications, aujourd’hui sur la table du ministère des Sports.
Discipline par discipline, voici comment pourrait se traduire, très concrètement, le retour sur le terrain pour tous les randonneurs, alpinistes, grimpeurs et autres kayakistes.
« La course à pied et le vélo sont des sports de masse que le ministère des Sports a pu appréhender facilement », expliquait hier à Outside Yannick Vallençant, Président du SIM-CFDT, le Syndicat interprofessionnel de la montagne à l’origine, avec l’Union nationale des accompagnateurs de montagne (UNAM) et l’Association professionnelle sport & outdoor (APSO), d’un appel à « déconfiner la pratique de certains sports de pleine nature pour les amateurs à partir du 11 mai ».
Aussi apprenait-on dans un rapport ministériel rendu public mardi que « Les Français devraient pouvoir « courir, marcher et rouler » en extérieur dans des conditions ‘normales’ à partir du 11 mai.» Une bonne nouvelle pour les runners et cyclistes mais beaucoup d’incertitudes pour tous les pratiquants de sports de pleine nature plus engagés. «Certaines pratiques plus pointues, telles que l’escalade, le kayak ou le parapente, sont beaucoup moins connues de l’administration », poursuit en effet Yannick Vallençant, nous avons donc pris les devants et décidé de répondre à la mise en demeure lancée par le Premier Ministre à chaque ministère concerné (et notamment au ministère des Sports) de lui soumettre sous 15 jours un plan de dé-confinement, secteur d’activité par secteur d’activité ». Un document remis le 19 avril, complété hier soir par des « Propositions de protocole transitoire pour un dé-confinement des sports de montagne ». En clair, les modalités concrètes qui intéressent au plus haut point les pratiquants.
Le ministère des Sports serait bien inspiré de prendre en compte ces deux documents de travail très détaillé. Car derrière les trois signataires, le SIM – affilié à la Fédération Française de la Montagne et de l’Escalade (FFME) – , l’UNAM et l’APSO, on retrouve en effet des éducateurs sportifs professionnels de la montagne, (guides, moniteurs d’escalade, de canyoning et de spéléologie), mais aussi des accompagnateurs en montagne, des parapentistes ou des plongeurs, dont l’expertise est précieuse.
Que propose ce plan de déconfinement ?
Dès à présent :
Ré-autoriser (sur présentation de leur carte professionnelle) les éducateurs sportifs à s’entraîner sur leurs terrains naturels habituels soit en solitaire quand c’est possible (randonnée pédestre, course à pieds, cyclisme, VTT, etc) , soit au maximum à deux quand c’est un impératif de sécurité (ex : escalade et autres disciplines à corde) en respectant et en adaptant les gestes barrières qui ne sont pas incompatibles avec la plupart de ces activités.
A partir du 11 mai, pour une reprise progressive des activités professionnelles :
- Faire en sorte que l’éducateur sportif ne soit pas lui-même un facteur de contamination en lui faisant subir un test médical initial au COVID-19 puis des tests de vérification à intervalles réguliers (fréquence selon disponibilité des tests) dont la négativité conditionnerait la poursuite des activités professionnelles
- Restreindre les groupes encadrés de 1 à 8 personnes (effectifs adaptables selon le type d’activité), sous condition de respect au sein du groupe de mesures spécifiquement adaptées à chaque discipline et dont un protocole précis sera établi et fourni aux autorités compétentes
- Adapter et limiter la pratique professionnelle (dans les départements en forte tension des services d’urgences sanitaires et des équipes de secours) à des activités et itinéraires reconnus comme correctement sécurisés selon les standards de l’activité
- Désinfecter complètement le matériel de prêt entre chaque groupe
- Demander prioritairement aux pratiquants encadrés d’utiliser leurs équipements de protection individuelle personnels (pour éviter les risques de contamination d’un client et d’un groupe à l’autre)
- Limiter au strict minimum le transport collectif (rendez-vous si possible au départ des activités en véhicules séparés, clients d’une part et encadrant d’autre part)
- Limiter l’usage des remontées mécaniques (en particulier en cas de cabines fermées)
- Autoriser des bivouacs et nuits sous tente selon les réglementations locales habituelles (et sous condition de respect des autres conditions précitées), notamment autour des refuges de montagne pouvant alors exercer une activité de restauration à emporter.
De la rando au kayak, comment appliquer ces mesures ?
Préconisées lors de la pratique en club ou association, bonne partie de ces précautions peuvent être intégrées en sortie individuelle.
Alpinisme / Escalade en milieux naturels/ Via ferrata
- Groupes ≤ 6 personnes
- Port de gants autant que possible, en particulier en phase d’assurage et de manipulation des relais (et pied de voie pour l’escalade)
- Port du masque individuel lors de toute phase de regroupement <4,5 m
- Désinfection systématique (non destructive) avant/après du matériel de prêt aux clients
Randonnée pédestre ou VTT
- Groupes ≤ 12 personnes
- Désinfection systématique avant/après l’activité des poignées de bâtons et des points de contact (guidon, selle, etc) en cas de prêt aux clients
Canyoning/ Spéléologie
- Groupes ≤ 8 personnes
- Port de gants spécifiques
- Port du masque individuel lors de toute phase de regroupement <4,5 m (assistance, relais)
- Désinfection systématique (non destructive) avant/après du matériel de prêt aux clients
- Avec, pour la spéléo, une préférence pour les cavités et volumes offrant une progression limitant les contacts et le port de gants en permanence.
Parapente
- Groupes d’enseignement ≤ 6 personnes
- Port de gants
- Port du masque individuel en phase de regroupement <4,5 m
- Pour les vols biplace : protection renforcée du pilote (masque + visière + lunettes intégrales) et du passager (masque + éventuellement combinaison intégrale) durant toute la préparation et le vol
- Désinfection systématique (non destructive) avant/après du matériel de vol fourni aux clients
Eau vive (kayak, rafting)
- Groupes ≤ 6 personnes
- Port de gants et combinaisons permanent
- Port du masque individuel en phase de regroupement <4,5 m
Mushing
- Groupes été (cani-rando, kart, cani-trottinette) ≤ 12 personnes
- Groupes hiver ≤ 6 personnes
- Port de gants permanent
- Port du masque individuel en phase de regroupement <4,5 m
Des mesures très précises donc, mais pas forcément facile à mettre en œuvre. Comment toujours garantir par exemple que lors des transports collectifs on puisse n’avoir que « : 2 personnes maximum par banquette (>1 m de distance), soit 6 personnes max dans un véhicule 9 places désinfecté, avec masque et gants pour tout » ? Et les tests de dépistage seront-ils suffisamment disponibles pour que les encadrants soient régulièrement testés ? Reste que les bases de réflexion sont clairement posées et semble-t-il toutes les situations prises en compte.
Après avoir strictement appliqué les règles du confinement, les professionnels et pratiquants de l’outdoor continuent de manifester leur volonté de prendre en compte les nécessaires contraintes de santé publique liées à l’épidémie. Espérons que cette attitude positive et constructive sera entendue à Paris.
Photo d'en-tête : Martin Jernberg