La station de ski de Montclar les 2 vallées, dans les Alpes du sud, a utilisé ces derniers jours un hélicoptère pour combler le manque de neige sur le bas du domaine. Une solution pour le moins radicale que justifierait la volonté d’offrir des conditions suffisantes pour skier, selon la société gérant les remontées mécaniques qui s’empresse de nous rassurer : « ne vous inquiétez pas, l’hélicoptère ne deviendra pas une habitude ». Ben voyons!
Les faits
Après des chutes de neige précoces et abondantes dans la majeure partie des Alpes, l’enneigement fluctue depuis, du fait notamment des températures élevées constatées dans de nombreux massifs. À Montclar les 2 vallées, la situation est à l’image de ce début de saison atypique : bon enneigement en altitude, mais la situation dans le bas du domaine l’est beaucoup moins.
Pour répondre à cette problématique et s’assurer que les touristes présents pour cette deuxième semaine des vacances aient suffisamment de neige, les dirigeants de la station ont pris la décision d’héliporter de la neige des sommets vers le bas des pistes. L’opération qui s’est déroulée samedi dernier, le 28 décembre, a permis de combler les 200 m³ manquants. Coût de l’opération : 8 000 €.
L’enjeu économique
Alors que de plus en plus de stations s’interrogent sur la manière de réduire leur impact environnemental – la station italienne de Pejo qui vient de bannir le plastique en est un exemple – ce choix laisse plus que songeur, et le mot est faible ! De nombreuses réactions négatives ont d’ailleurs étaient observées sur les réseaux sociaux, certains appelant même à boycotter la station.
De son côté, Alain Quièvre, président de MDS, société qui gère les remontées mécaniques de Montclar, a justifié sur Facebook ce choix par une nécessité économique. « On sait que la station pèse pour 350 emplois directs et indirects sur l’ensemble du canton. L’enjeu économique de cette deuxième semaine est d’environ 150 000 € pour la station et de 900 000 € de retombées économiques. […] L’enjeu, c’était la sauvegarde des emplois ».
Par ailleurs, pour répondre aux commentaires critiques sur l’impact environnemental et l’image que renvoyait une telle initiative, la station a mis en avant l’efficacité d’utiliser un hélicoptère plutôt que des dameuses. Sur sa page Facebook, où elle annonce fièrement « avoir mis le paquet pour offrir les meilleures conditions possibles aux skieurs », on pouvait lire cette explication : « Nous comprenons tout à fait que cette image d’hélicoptère peut avoir une connotation négative, mais croyez-nous, l’hélicoptère sur une demi-journée a moins d’impact écologique que 3 dameuses sur 3 jours (temps qu’il aurait fallu si nous avions fait cette action avec des dameuses). »
Mais jusqu’où ira-t-on pour assurer l’enneigement ?
Et la station d’enchaîner en nous promettant: « l’hélicoptère ne deviendra pas une habitude, nous avons à coeur de respecter cette belle nature qui nous entoure tout en vous permettant d’en profiter un maximum ». Nous voilà rassurés! En « profiter au maximum », voilà qui résume bien la vision à court terme qui, une fois de plus, prévaut. Sidérant en 2020, au lendemain de la COP25 et d’une année marquée par les désastres écologiques. D’autant que au regard des changements climatiques, on peut légitimement s’interroger sur les choix qui seront fait à l’avenir pour assurer un enneigement suffisant, notamment dans les stations de moyenne altitude.
Dans une étude publiée en 2018, le CNRM (Centre National de Recherches Météorologiques) relève par exemple qu' »au col de Porte (1 325 m) – soit l’altitude du bas de la station de Monclar, l’épaisseur moyenne de neige en hiver pour la période 1990-2017 est en moyenne 39 cm plus basse que pour la période 1960-1990, soit une baisse de 40 % environ« . Pour lutter contre ce phénomène, les stations ont massivement investi dans des infrastructures leur permettant de produire de la neige « de culture », grâce aux canons à neige notamment. Mais lorsque les températures sont trop élevées, ce procédé n’est pas fonctionnel.
Vient alors le transport de neige, en dameuse ou donc, en hélicoptère, solution dont l’impact environnemental est conséquent. Mais cela a-t-il vraiment un sens ? Vouloir sauver à tout prix le ski en moyenne altitude plutôt que diversifier les activités et repenser le tourisme hivernal en montagne, certaines stations semblent malheureusement avoir fait leur choix.
Photo d'en-tête : © Toa Heftiba / Unsplash- Thèmes :
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