Oui … mais la balle est désormais dans le camp des préfets a-t-on appris ce soir. C’est au cas par cas que va finalement se jouer l’accès aux plages et aux activités nautiques le 11 mai. « La règle générale reste la fermeture mais le préfet pourra autoriser l’accès aux plages, lacs et centres nautiques sur demandes des maires », a en effet annoncé le ministre de l’Intérieur, lors de de son allocution pour la suite du plan du déconfinement.
Une solution de compromis, à l’issue d’intenses négociations, annonces et contre annonces, comme nous l’expliquions dans l’article publié aujourd’hui en milieu de journée que nous reproduisons intégralement ci-dessous.
Entre décisions du gouvernement, amendements du Sénat et coups de gueule des élus sur le littoral, pas facile de comprendre si nous allons pouvoir surfer, naviguer, nager en mer et dans les lacs ou tout simplement courir sur le sable dans une semaine. Pourtant des solutions se profilent. Souvent inspirées d’initiatives déjà en place en Italie, en Espagne ou en Australie.
A l’image d’une gestion de l’épidémie manquant singulièrement de cohérence, l’accès aux plages le 11 mai reste encore officiellement incertain alors qu’il semble acquis, si l’on s’appuie sur le tweet hier matin de la ministre des Sports, Roxana Maracineanu que « partout sur le territoire, vous aurez accès aux forêts, à la montagne, et à de nombreux sites naturels ». Soulagement hier pour les randonneurs. Espoirs pour les alpinistes et les grimpeurs, qui restent toutefois en attente de précisions. Et … douche froide pour les pratiquants des activités nautiques : « A ce stade, les plages et lacs restent fermés ; la situation sera réévaluée fin mai pour une décision effective au 2 juin » conclut la ministre, ignorant l’amendement du Sénat qui, la veille, autorisait, sous conditions, l’accès aux plages dès le 11 mai.
Le message du gouvernement ayant visiblement du mal à passer sur le littoral, où fédérations de sports nautiques et élus font valoir qu’un usage « dynamique » de la plage – en clair, pas de bronzette sur serviette – serait nettement moins contaminant qu’un passage par le métro, le « Monsieur Déconfinement » du gouvernement, Jean Castex, explique donc quelques heures plus tard devant les sénateurs que rouvrir les plages dès le 11 mai, même sous conditions, incitera les citadins à « se mettre au vert » en bord de mer. Avec, dit-il, la crainte de brassages de population à éviter à tout prix.
Du cas par cas
Pas déboutés pour autant, une partie des sénateurs et des députés est remontée au créneau hier après-midi, mettant en avant que les plages de la Manche ou de la façade Atlantique, immenses à marée basse, devraient pouvoir faire exception, d’autant qu’elles sont situées à plus de 100 km d’une grande métropole. Au final, un amendement au projet de loi sur la prolongation de l’état d’urgence sanitaire devrait permettre aux maires et aux préfets de négocier ensemble, au cas par cas, la réouverture rapide de certaines plages. Ces discussions étant soutenues par le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, député LREM du Finistère on s’acheminerait donc … vers du cas par cas, en régions.
Sans attendre, en Charente-Maritime, le maire de Saint-Pierre-d’Oléron, Christophe Sueur, a tout bonnement annoncé, lui, qu’il autoriserait l’accès à certaines plages de son territoire dès le 11 mai, selon France Bleu La Rochelle. Que les réouvertures soient permises ou non. Ce qu’avait déjà envisagé certaines communes sur le littoral méditerranéen ou atlantique.
Ailleurs, à Cassis, par exemple, on apprend ce matin dans La Provence,
que la maire propose une réouverture par tranches horaires des plages, après en avoir longuement parlé avec le cabinet de Jean-Baptiste Lemoyne, chargé du tourisme au ministère des Affaires étrangères . « On pourrait imaginer un créneau matinal, entre 7h30 et 10h par exemple, pour les enfants et les personnes âgées. Puis un autre pour les adultes ou les familles, ce qui permettrait d’étaler la fréquentation. Si on organise la surveillance de manière un peu ludique avec les sauveteurs et les policiers municipaux, je pense que tout le monde jouera le jeu et saura garder ses distances ». Elle compte en revanche fermer les plages le soir pour éviter les débordements, précise le quotidien. Une organisation qui n’est pas sans rappeler celle que d’autres pays ont adoptée.
Un parasol tous les 3 mètres
L’Espagne, pays qui compte à ce jour plus de 26 000 décès, a mis fin samedi dernier au confinement le plus strict d’Europe. Depuis le 2 mai, les maires peuvent décider de la réouverture des plages, notamment à San Sebastian, au Pays basque espagnol. Les règles de distanciation sociale et d’hygiène y sont en vigueur, et, pour limiter l’afflux, des tranches horaires et des catégories d’âge ont été établies.
En Italie, la Ligurie, les Abruzzes, la Vénétie et l’Emilie-Romagne ont été les premières, mi avril, à autoriser la préparation des plages dans la perspective de l’ouverture de la saison. Les solutions les plus étonnantes ont été envisagées, sans toujours vraiment convaincre. Une entreprise a ainsi imaginé des sortes de box en plexiglas à installer sur les plages. De quoi bronzer tout en restant loin des autres vacanciers. L’idée qualifiée de « sauna finlandais”, par le quotidien « La Repubblica », n’aurait pas convaincu les professionnels du tourisme qui lui préfèrent des solutions plus « classiques ». Parmi elles : le port du masque, la désinfection du sable et des espaces communs, douches et cabines, ou la réduction du nombre de transats sur ses plages, comme l’envisage pour juin la maire de Riccione, sur la Riviera romagnole. Autres options : la réservation avant de se rendre sur les plages, celles-ci n’étant alors accessibles qu’à certaines heures selon le type de population, les personnes âgées et fragiles étant les plus à risque. Sans compter l’obligation de maintenir une distance de 3 mètres entre chaque parasol. Seules 3 ou 4 personnes pouvant s’y tenir dessous, contrainte qu’il sera sans doute très difficile de faire respecter.
L’option « pass plage »
En Belgique, la station balnéaire d’Ostende envisage, elle aussi, un système de réservation. Une application permettrait de demander un « pass plage », ce qui limiterait l’afflux sur les sites divisés en plusieurs zones délimitées, explique le quotidien Le Soir. Les habitants d’Ostende et les propriétaires de résidences secondaires seraient alors prioritaires, ce qui est loin de faire l’unanimité auprès des communes voisines.
Aux Etats-Unis , où faute de message clair de Washington, chaque Etat se voit contraint de gérer une épidémie qui continue de faire des ravages (74 581 décès dus au Covid-19 à ce jour), certaines plages sont à nouveau officiellement accessibles. C’est le cas de l’immense Huntington Beach, ouverte tous les jours de 5 heures à 22 heures mais exclusivement pour des loisirs actifs. A savoir les activités en mer ainsi que la marche, la course, la randonnée et le vélo. Les plages et l’océan étant fermés aux jeux passifs, à la flânerie et aux bains de soleil.
Surfeurs et nageurs only
En Australie enfin, des plages de Sydney ont rouvert le 28 avril, notamment Coogee et Maroubra où des annonces par des haut-parleurs rappellent aux nageurs de respecter les règles de distanciation sociale. A Waverley, qui comprend la fameuse plage de Bondi et ses environs, seuls deux points d’accès à la mer ont été mis en place. Pour la baignade et le surf uniquement. Aucune possibilité donc de lézarder sur la plage, l’accès au sable est fermé, ce qui signifie qu’on ne peut ni courir, ni marcher, ni se rassembler, ni emmener ses enfants jouer sur le sable. Des restrictions qui continuent de s’imposer, ce secteur ayant été classé comme « point chaud » après le recensement de plus de 180 cas de COVID-19, parmi lesquels de nombreux routards et habitants.
Si l’Australie ne compte à ce jour « que » 97 morts décès dus au Covid-19, elle n’en reste en effet pas moins vigilante. « Nous voulons nous assurer que cela se passe dans le respect des règles sanitaires et de distanciation sociale », a déclaré la maire de Waverley à l’AFP. Mais « si les gens ne les respectent pas et s’il y a trop de monde, nous serons contraints de fermer la plage ».
Conscientes des enjeux de santé publique, la plupart des communes françaises se disent prêtent à assumer les nombreuses contraintes qui s’imposent. Leur tâche ne sera certainement pas facile, mais elle devrait faire des heureux. A ce jour 26106 personnes ont signé la pétition « Accès à la mer pour la pratique des activités # 11 Mai Fin du confinement ».
Article publié aujourd’hui à 14h43, mis à jour à 18h38.